Puisqu’elle représente une fraction du capital social, l’action est en principe indivisible. Ce principe de l’indivisibilité s’applique traditionnellement aussi bien aux titres qu’aux droits y afférents et signifie que ni les titres, ni les droits s’y rapportant ne peuvent être l’objet d’un fractionnement, sauf à tenir compte des hypothèses où la loi l’admet par exemple au titre de l’usufruit ou de l’indivision conformément aux articles L225-110 et L225-118 du Code de commerce.
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Sommaire
La différence entre le démembrement de droits sociaux et l’indivision
Le démembrement de la propriété de droits sociaux suppose que deux ou plusieurs personnes exercent de manière simultanée les différentes prérogatives conférées par la propriété de parts sociales ou d’actions ; à la différence de l’indivision, cet exercice est exclusif et non concurrent au sens où chaque protagoniste dispose d’une prérogative distincte de celle détenue par l’autre.
Définition de l’usufruit
Le démembrement résulte de l’existence d’un usufruit défini par l’article 578 du Code civil comme étant « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance ». Dès lors, l’usufruiter peut user et jouir du bien (usus et fructus) tandis que le nu-propriétaire conserve le droit de disposer de celui-ci (abusus).
Il est intéressant d’étudier, en cas de démembrement des droits sociaux, comment s’opère la répartition des pouvoirs sociaux entre l’usufruiter et le nu-propriétaire.
Le vote des décisions collectives en présence d’un démembrement des droits sociaux
La répartition légale du droit de vote
La loi organise la répartition du droit de vote entre l’usufruitier et le nu-propriétaire.
D’une part, cette répartition est envisagée par l’article 1844 du Code civil aux termes duquel « si une part est grevée d’un usufruit, le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier ».
Les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions bénéficient d’un régime dérogatoire prévu par l’article L.225-110 du Code de commerce selon lequel le droit de vote appartient à l’usufruitier dans les assemblées générales ordinaires et au nu-propriétaire dans les assemblées générales extraordinaires.
Les aménagements conventionnels de la répartition du droit de vote
Le nu-propriétaire et l’usufruitier peuvent convenir que le droit de vote sera exercé exclusivement par l’usufruitier peu importe l’ordre du jour.
En effet, les règles légales de répartition du droit de vote entre nu-propriétaire et usufruitier ne sont pas toutes impératives comme l’a précisé la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 2 mars 1994.
En pratique, le nu-propriétaire et l’usufruitier jouissent d’une grande liberté quant à la répartition du droit de vote pourvu qu’une clause statutaire soit prévue à cet effet.
Il convient toutefois de préciser que s’il peut être convenu entre le nu-propriétaire et l’usufruitier que ce dernier exercera exclusivement le droit de vote, l’inverse n’est pas admis.
Une clause statutaire privant totalement l’usufruitier de son droit de vote est nulle (Cass.com ., 31 mars 2004). En pratique, le droit de vote de l’usufruitier n’est incompressible que pour les décisions d’affectation des bénéfices, prérogative reconnue à celui-ci conformément à l’article 578 du Code civil.
Lorsque le droit de vote est accordé à l’usufruitier pour toutes les décisions, le nu-propriétaire conserve cependant son droit de participer aux décisions collectives. Est réputée non écrite la clause statutaire qui priverait le nu-propriétaire qui ne vote pas d’être présent lors des délibérations (Cass.com., 4 janvier 1994).
Dès lors, les juges distinguent le droit de voter du droit de participer à l’assemblée. La notion de participation peut être entendue comme étant le droit pour le nu-propriétaire dénué du droit de vote, d’être convoqué à toutes les assemblées, d’être informé préalablement à leur tenue et de pouvoir s’y exprimer. Le nu-propriétaire dénué du droit de vote qui n’aurait pas été convoqué à une assemblée peut solliciter l’annulation des délibérations concernées.
La répartition des résultats en cas de démembrement de droits sociaux
L’article 582 du Code civil, applicable au démembrement de propriété, prévoit que « l’usufruitier a le droit de jouir de toute espèce de fruits, soit naturels, soit industriels, soit civils, que peut produire l’objet dont il a l’usufruit ». Il en résulte que l’usufruitier a droit aux bénéfices distribués afférents aux droits sociaux qu’il détient.
Est ainsi visé uniquement le bénéfice distribué et non le bénéfice distribuable. Le droit de l’usufruitier prend naissance par la décision d’allocation de dividendes prise par les associés de la société.
En cas d’exercice du droit d’attribution ou de souscription d’actions par le nu-propriétaire, l’usufruitier s’en verra conférer l’usufruit ; enfin, en cas de remboursement des droits d’actionnaire par le rachat des actions par la société, il aura droit à la propriété de la valeur de l’usufruit. Quant au nu-propriétaire, il conserve les autres droits liés notamment au remboursement du capital, au remboursement du nominal de l’action, au boni de liquidation, aux dividendes prélevés sur les réserves, à la prime d’émission, ou encore à la prime de fusion.
En conclusion, en présence d’un démembrement de droits sociaux, certaines spécificités sont à prendre compte notamment s’agissant de l’exercice du droit de vote.
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