Le management package est un outil d’intéressement de dirigeants et salariés clef consistant à attribuer des actions d’une société afin de récompenser la fidélité et/ou la performance de ces personnes. L’administration est venue contrôler la nature de ces attributions en les requalifiant parfois en salaires déguisés.
Pour déterminer les critères de requalification de la plus-value réalisée grâce aux management packages, il convient de retracer les décisions récentes qui les mettent en lumière.
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Sommaire
La première prise de position de la Cour de cassation
Dans un arrêt du 4 avril 2019, la Cour de cassation se prononce pour la première fois quant aux critères de requalification fiscale du gain réalisé par un dirigeant ou un salarié en vertu des management packages. Elle s’aligne sur la position du Conseil d’Etat en jugeant que doivent être assujettis aux cotisations sociales des bons de souscription en actions attribués au bénéfice exclusif de managers « dès lors qu’ils sont proposés aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail et acquis par ceux-ci à des conditions préférentielles ».
La Cour de cassation considère également que : « l’avantage devait être évalué selon la valeur des bons à la date à laquelle les bénéficiaires en ont obtenu la libre disposition ». Dans cette hypothèse, les gains dégagés seront imposés dans la catégorie des traitements et salaires en vertu des articles 79 et suivants du Code Général des Impôts et non plus dans la catégorie des plus-values mobilières.
Les précisions jurisprudentielles récentes
Les critères de qualification dégagés par le Conseil d’Etat
Dans trois décisions majeures du Conseil d’Etat en date du 13 juillet 2021, les critères de requalification du gain réalisé grâce aux management packages sont précisés. Dans un premier temps, le Conseil d’Etat offre la clé de lecture suivante : toute interrogation sur l’existence d’un avantage ou d’un gain constitutif d’une matière taxable et sa qualification doit être opérée à plusieurs stades dans la vie de ces instruments, à savoir d’une part lors de l’entrée dans le dispositif de management package par l’acquisition du bon, et d’autre part lors de la sortie du dispositif, c’est-à-dire lors de l’exercice de ces bons ou de leur cession sans les avoir exercés.
Dans un premier temps, si l’on se place à l’entrée du dispositif de management package, le Conseil d’Etat fixe deux critères pour la requalification fiscale de la plus-value réalisée en salaires.
D’une part, doit être constatée l’existence d’un avantage. Cet avantage se traduit en pratique par la fixation par la société du prix du bon à un niveau préférentiel au bénéfice du manager par rapport à celui qui aurait été exigé d’un investisseur tiers.
D’autre part, pour que l’administration fiscale puisse imposer ces gains au titre des traitements et salaires, il faut caractériser l’existence d’un lien entre cet avantage et les fonctions de dirigeant du manager concerné. Au sens du Conseil d’Etat, pour établir ce lien, il est possible de se fonder sur les circonstances de l’émission, sur les stipulations inscrites au contrat d’émission ou encore sur d’autres conventions conclues par exemple entre le dirigeant et les investisseurs.
Dans un second temps, si l’on se place à la sortie du dispositif de management package, en présence d’un gain constitutif d’un avantage salarial lors de l’exercice des bons ou de leur cession, le principe est celui d’une imposition dans la catégorie des plus-values sur valeurs mobilières.
Par exception, la plus-value réalisée doit être requalifiée en gain salarial dès lors qu’elle « trouve essentiellement sa source dans l’exercice par l’intéressé de ses fonctions de dirigeant ou de salarié ».
Les critères permettant d’établir qu’un gain présenterait un lien avec l’exercice de fonctions de salarié ou de dirigeant sont nombreux et doivent être appréciés au cas par cas selon la méthode du faisceau d’indices.
Le Conseil d’Etat offre là encore une clé de lecture des éléments qui seraient de nature à caractériser l’existence d’un lien entre le gain et les fonctions de celui qui en bénéficie. Il considère à cet égard que le « rattachement du gain au contrat de travail peut par exemple être révélé […] par des circonstances tirées de ce que l’octroi du bon ou de l’option était lié aux fonctions de l’intéressé, que l’exercice du bon ou de l’option est subordonné au maintien pendant une certaine durée de l’intéressé dans l’entreprise, voire à sa présence dans l’entreprise à la date de levée de l’option, ou encore par l’existence d’un lien entre les conditions dans lesquelles l’option est levée (prix d’exercice, quotité) et l’atteinte de certains objectifs de rentabilité ou de résultat ».
Dès lors, l’administration fiscale doit, pour requalifier les gains issus de l’exercice des bons ou des options, prouver l’existence d’un lien entre ces gains et les fonctions exercées par le contribuable ; la seule constatation de l’exercice des fonctions de dirigeant ou de salarié n’étant pas suffisante.
Plus récemment, dans une décision du 28 janvier 2022, le Conseil d’Etat confirme que lorsque des plans de management packages sont structurés sous la forme d’acquisitions d’actions par les managers, la requalification du gain de cession sera possible chaque fois que « le gain est regardé comme acquis, non à raison de la qualité d’investisseur du cédant, mais en contrepartie de ses fonctions de salariés ».
Il reconnaît par ailleurs la possibilité pour l’administration fiscale de traiter de tels gains comme des salaires lorsqu’ils sont réalisés par l’intermédiaire d’une société holding sans substance, sur le fondement de la procédure de répression des abus de droit.
La reprise de ces critères par la Cour de cassation
La Cour de cassation adopte le raisonnement du Conseil d’Etat.
Par exemple, dans un arrêt du 28 septembre 2023, elle juge que dès lors que des bons de souscription en actions sont attribués aux travailleurs dans le cadre professionnel et acquis à des conditions préférentielles, ils génèrent un avantage entrant dans l’assiette des cotisations sociales.
Elle explique ensuite que le caractère préférentiel des conditions d’attribution « résulte tant de la qualité de salariés ou de mandataires sociaux des bénéficiaires et de leur nombre limité que des conditions d’émission et de cessibilité des bons, les conditions financières de la souscription n’en constituant qu’un simple indice. ».
La Cour de cassation change toutefois de position par rapport à ce qu’elle avait jugé en avril 2019 : le fait générateur des cotisations sociales afférentes aux gains doit désormais s’entendre de la cession ou de la réalisation des bons.
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