L’opération de leverage buy out (LBO) peut entraîner la mise en jeu de la responsabilité pénale des intervenants. Nous vous présentons les risques pénaux présents dans les opérations de LBO.
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Sommaire
Qu’est-ce qu’une opération de LBO ?
Il s’agit d’une opération qui permet à une ou plusieurs personnes physiques ou morales d’acquérir une entreprise, la société cible. Pour ce faire, une société holding est créée la plupart du temps pour financier l’acquisition en ayant recours à l’emprunt lequel est ensuite remboursé grâce à l’amélioration de la trésorerie de la cible. C’est une logique dite d’effet de levier.
Quels risques pénaux ?
En raison du schéma fiscal et juridique qui permet de la mettre en œuvre, l’opération de LBO fait naître plusieurs risques de nature civile et pénale pour les dirigeants et les actionnaires de la société holding d’une part mais aussi de la société cible.
Le risque sur le fondement de l’abus de bien sociaux
Le 4° de l’article L241-3 et le 3° de l’article L242-6 du Code de commerce visent le délit d’abus de biens sociaux ou de crédit de l’entreprise. En ce sens, est sanctionné « le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement ». L’article L242-6 3° étend le champ de cette dispositions aux président, administrateurs ou directeurs généraux d’une société anonyme. La sanction encourue est la suivante : une peine d’emprisonnement de cinq ans et une amende de 375 000 euros.
Dans le cadre d’une opération de LBO, deux motifs principaux de mise en jeu de la responsabilité pénale des dirigeants des sociétés parties sont identifiés.
Les conventions de trésorerie centralisée
Les conventions de trésorerie centralisée mises en place entre la société holding et la société cible font naître des risques. Ces conventions visent essentiellement à financer le remboursement de la dette qu’a contractée la société holding pour acquérir la société cible grâce la trésorerie de cette dernière. La responsabilité des dirigeants des sociétés holding et cible peut être mise en jeu si ces conventions s’avèrent déséquilibrées ou sans contrepartie réelle pour la société cible.
Pour pallier ce risque, peut être mise en avant la jurisprudence dite « Rozenblum » (Cass. Crim. 4 février 1985, n° 84-91.581) selon laquelle l’intérêt d’un groupe de sociétés prime sur le caractère délictueux de certains actes. L’intérêt du groupe est caractérisé lorsqu’un acte, en l’occurrence la convention de trésorerie centralisée, est justifié par l’intérêt économique, financier ou social commun et n’est pas démuni de contrepartie ou du moins ne rompt pas l’équilibre des engagements respectifs des sociétés concernées sans excéder les possibilités financières de la société qui en supporte la charge.
Toutefois, en pratique, il demeure assez rare que les juges acceptent de caractériser l’intérêt de groupe au profit d’une société holding et d’une société cible dans le cadre d’une opération de LBO. Il est donc préférable de mettre en place une convention de trésorerie centralisée la plus équilibrée possible et avec une réelle contrepartie.
La fusion entre la cible et la holding
La fusion entre la cible et la holding est elle aussi source de risques pénaux pour le dirigeant notamment s’agissant de sa conformité avec l’intérêt social de la société cible, et en particulier si elle intervient rapidement après la prise de contrôle. Si la fusion est trop rapide et apparait comme contraire à l’intérêt social de la société cible, les dirigeants encourent un risque de voir leur responsabilité pénale engagée sur le fondement de l’abus de biens sociaux et l’abus de pouvoir de voix.
Le risque sur le fondement de l’abus de pouvoir ou des voix
Le 5° de l’article L241-3 et le 4° de l’article L242-6 du Code de commerce visent le délit d’abus des pouvoirs ou des voix. En ce sens, est sanctionné « le fait, pour les gérants, de faire, de mauvaise foi, des pouvoirs qu’ils possèdent ou des voix dont ils disposent, en cette qualité, un usage qu’ils savent contraire aux intérêts de la société, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou une autre entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement ». L’article L242-6, dans son 4°, étend le champ de cette disposition aux président, administrateurs ou directeurs généraux d’une société anonyme. La sanction encourue est la suivante : une peine d’emprisonnement de cinq ans et une amende de 375 000 euros.
Une action contre le dirigeant social pour abus de pouvoir ou de voix peut, par exemple, être menée à la suite de la mise en place d’une convention de trésorerie centralisée déséquilibrée.
En pratique, ce délit permet de sanctionner les fautes qui ne remplissent pas les conditions nécessaires pour caractériser l’abus de biens sociaux.
Le risque sur le fondement de la violation de l’article L225-216 du Code de commerce
Au sens de cet article, « une société ne peut avancer des fonds, accorder des prêts ou consentir une sûreté en vue de la souscription ou de l’achat de ses propres actions par un tiers ».
Dès lors, il est interdit à la société cible d’accorder à la société holding un prêt pour financer l’achat de ses propres actions auquel cas la responsabilité pénale du dirigeant serait engagée. Pour autant, la mise en place de conventions de trésorerie centralisée permet de contourner cette interdiction puisqu’elle est admise a posteriori permettant alors à la société holding de rembourser la dette liée à l’achat de la société cible.
La société cible, sous peine d’engager la responsabilité pénale du dirigeant, ne peut pas non plus consentir toute forme de sûreté garantissant l’emprunt consenti à la holding en vue de l’achat de ses actions.
Pour conclure, mêmes si les condamnations pénales liées à ces risques demeurent rares en pratique, il est important de savoir les identifier pour éviter leur réalisation.
Si vous envisagez de vous lancer dans une telle opération et que vous souhaitez être accompagné, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié pour bénéficier de conseils adaptés à votre situation.
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