Les sociétés en nom collectif (SNC) sont des sociétés « de part sociale » dont le régime se caractérise par une grande importance accordée à la personne des associés. Cet intuitus personae est mis en exergue par le caractère fermé de la société ; on n’y entre et on n’en sort pas sans l’agrément unanime des associés.
Il est alors essentiel d’avoir connaissance des modalités légales de l’agrément au sein d’une SNC afin de déterminer si cette forme sociale est adaptée à votre projet entrepreneurial.
Notre analyse sur l’agrément au sein d’une société en nom collectif (SNC) et sur les solutions afin de dépasser l’obstacle de l’agrément.
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Sommaire
Un agrément obligatoire et strict
L’agrément au sein d’une SNC est imposé par le Code de commerce qui dessine les (très) larges contours de son domaine d’application.
Les conditions de l’agrément
L’agrément du cessionnaire de part sociale d’une SNC doit être unanime et exprès.
Un agrément unanime
L’article L. 221-13 du Code de commerce énonce que l’agrément est donné à l’unanimité des associés. Formulé positivement ; tous les associés doivent donner leur accord à la cession de part sociale projetée. Formulé négativement ; tout associé dispose d’un droit de véto à l’entrée du cessionnaire dans la société.
En cohérence, le cédant ne peut se prononcer contre l’agrément de l’acquéreur. Dans cette hypothèse, le cessionnaire peut obtenir en justice que son vote soit réputé favorable (Cass. 3e civ., 19 févr. 1970).
Un agrément exprès
L’agrément ne peut pas être déduit du silence des associés ; il doit être exprès. La question pourrait être soulevée dans l’hypothèse d’un partage de communauté.
Pour autant, si un associé s’abstient d’exercer son refus d’agrément puis garde le silence sans motif valable pendant une longue durée, il s’expose à devoir réparer le préjudice conséquent à l’impossibilité de se retirer de la SNC. Il doit aussi indemniser le cessionnaire pour son préjudice moral (Cass. com., 6 févr. 2019).
Le domaine de l’agrément obligatoire
Le domaine de l’agrément dans les SNC concerne des personnes et des opérations. Les statuts ne peuvent déroger à ces dispositions d’ordre public.
Les cessionnaires soumis à l’agrément
Conformément à l’article L. 221-13 du Code de commerce, toute cession de parts d’une SNC, même entre associés, doit être agréée. Donc, aucune personne n’échappe à la procédure de l’agrément, qu’elle soit un tiers ou une partie au contrat de société.
Les opérations objet d’un agrément
La référence à « toute cession » doit être comprise largement. Les cessions à titre onéreux font évidemment l’objet d’un agrément. Mais il en va ainsi également pour les donations, les échanges et tout transfert de parts sociales intervenant du fait d’une fusion ou d’une scission. Les juges de cassation ont même précisé que devait être agréé le conjoint d’un associé qui revendique sa qualité d’associé sur le fondement de l’article 1832-2 du Code civil (Cass. com., 18 nov. 2022) alors même que cet article vise les « clauses d’agrément » et non pas l’agrément légal.
Ordre public
L’article L. 221-13 du Code de commerce dispose que toute clause statutaire qui contredit ses dispositions est réputée non écrite. Donc, les statuts ne peuvent prévoir un agrément à une majorité qu’ils fixent.
L’associé confronté au régime de l’agrément dans la SNC
Force est de constater que le régime de l’agrément au sein des SNC est rigide. Toutefois, il existe pour les entrepreneurs des solutions afin de se départir d’un régime aussi strict. Aussi, il est essentiel de connaître les effets de la violation des dispositions relatives à l’agrément.
Dépasser l’obstacle de l’agrément : deux solutions
Le régime contraignant de l’agrément dans les SNC peut être relativisé grâce à la stipulation d’une clause de rachat ou par l’effet de la conclusion d’une convention de croupier. Ces possibilités sont bienvenues dans la mesure où le code de commerce ne prévoit pas de droit de retrait pour les associés d’une SNC.
L’anticipation de la cession
D’abord, la jurisprudence sanctionne la pratique qui consiste à donner un agrément en blanc pour toute cession qu’un associé pourrait réaliser au bénéfice d’un cessionnaire non déterminé.
Toutefois, la stipulation d’une clause de rachat semble être licite. Celle-ci consiste à prévoir qu’un associé pourra céder ses parts sociales à une personne déterminée. Cette clause étant statutaire, elle doit être adoptée par tous les associés réunis en assemblée générale (art. L. 221-6 C. com.). L’exigence d’unanimité est donc mécaniquement observée.
La convention de croupier
La convention de croupier est une convention par laquelle un associé (le « cavalier ») convient avec un tiers (le « croupier ») de lui céder ses droits pécuniaires (bénéfices ou pertes), en partie ou en totalité, qu’il détient à l’égard d’une société. Le croupier n’est pas soumis aux procédures d’agrément.
La sanction de l’absence d’agrément
Lorsqu’une cession de parts sociales d’une SNC est réalisée sans agrément, la cession est inopposable à la société et le cédant demeure obligé aux dettes.
L’inopposabilité de la cession à la société
En principe, la violation d’une disposition d’ordre public est sanctionnée par la nullité. Toutefois, en l’absence de texte, la Cour de cassation a décidé que le défaut d’agrément de la cession des parts sociales n’est pas sanctionné par la nullité de la cession, mais par l’inopposabilité de la cession à la société et aux associés (Cass. com., 16 mai 2018).
L’obligation aux dettes du cédant
Les associés d’une SNC répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales (art. L. 221-1 C. Com.). Après la cession irrégulière, les associés pourront s’adresser au cédant afin qu’il contribue à la dette de la société. Ce dernier ne pourra pas opposer la cession à la société pour être libéré de son obligation.
Pour conclure, le régime de l’agrément unanime dans une SNC est triplement important ; il concerne tous les associés, toutes les opérations et les statuts ne peuvent y déroger.
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