Il est devenu tout à fait commun d’évoquer l’évolution des nouvelles technologies et leur impact sur l’ensemble de la science juridique, le droit des sociétés ne pouvait y échapper.
L’utilisation des nouvelles technologies présente de nombreux avantages, notamment de coût, mais au-delà des gains qui résultent de l’emploi du numérique, la sécurité juridique qu’entraîne l’automatisation de certaines procédures ou formalités constitue également un objectif prioritaire des pouvoirs publics.
Ces avantages expliquent que l’utilisation de l’outil numérique soit précisément identifiable au moment de la constitution de la société et lors de son fonctionnement.
Cependant les nouvelles technologies présentent leur lot de risques qu’il convient de connaître et d’appréhender.
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Sommaire
La blockchain, de quoi s’agit-il?
Définition de la blockchain
Elle est définie par l’article L. 223-12 du code monétaire et financier comme « un dispositif d’enregistrement électronique partagé ».
L’avantage de la blockchain:
Elle permet, entre autres, le transfert d’informations pertinentes ou la réalisation d’opérations décisives de façon secrète si le réseau est privé et les informations comme les opérations sont traçables grâce à la « mémoire informatique » des blocs. L’économie est réelle puisque la blockchain rend inutile le recours à un intermédiaire : tous les membres d’un même réseau (par exemple les associés d’une société) communiquent directement entre eux, sans entrave et sans contrôle « supérieur ».
Comment mettre la blockchain en application?
La blockchain peut-elle faciliter la constitution d’une société ?
S’il est sans doute trop tôt pour l’affirmer, la technologie blockchain pourrait utilement favoriser la constitution des sociétés en rendant plus aisée et plus rapide la production des statuts et des actes annexes. En effet, l’automatisation de la production de ces documents engendre :
- un gain de temps et d’argent
- une certaine sécurité
- offre de rendre disponible immédiatement l’ensemble des documents nécessaires pour les publicités au registre du commerce et des sociétés.
Cette technologie devrait d’ailleurs présenter d’autant plus d’utilité que le nombre d’associés est important, facilitant ainsi le transit des actes essentiels entre les parties prenantes, au sein d’un réseau privé sécurisé et fiable.
Exemple d’utilisation concrète:
Le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce a annoncé le 14 mars 2019 le développement d’une solution blockchain destinée à la tenue du RCS. Cette technologie serait utilisée notamment pour faciliter la communication entre les greffes lors d’un changement relatif à la vie d’une société.
Quels autres types d’utilisation de la blockchain?
Apport en crypto monnaie:
Hors les champs traditionnels de l’intermédiation bancaire ou de l’appel public à l’épargne, les sociétés commerciales peuvent exploiter une autre application de la blockchain : les crypto-monnaies et notamment les bitcoins (BTC).
Cet instrument constitue une sorte de monnaie virtuelle.
En outre, il est également admis qu’une crypto-monnaie peut être convertie en devise.
Récemment, les juges ont estimé que les BTC sont des biens consomptibles et fongibles, la qualification juridique des contrats de prêt y afférent est nécessairement celle de contrat de prêt à la consommation (T. com., Nanterre, 26 févr. 2020, no 2018F00466).
Représentation et transmission des titres financiers dans la blockchain
En dehors de l’augmentation de capital, le législateur français a investi les nouvelles technologies pour la sécurisation de certaines opérations sur le capital des sociétés non cotées.
C’est ainsi que l’ordonnance n°2017-1674 du 8 décembre 2017 offre aux sociétés non-cotées de recourir à un dispositif d’enregistrement électronique partagé pour la représentation et la transmission de leurs titres financiers non cotés.
Smart contracts
Smart Contracts, littéralement « contrats intelligents », sont des protocoles informatiques qui facilitent, vérifient et exécutent la négociation ou l’exécution d’un contrat, ou qui permettent de neutraliser ou de faire respecter, le cas échéant, une clause contractuelle rattachée au contrat intelligent.
La blockchain pourrait être mobilisée pour mettre en place ce type de protocoles informatiques destinés à déclencher automatiquement certaines stipulations des statuts ou d’un pacte d’actionnaires.
Quelques exemples:
- Si les statuts contiennent une clause d’agrément, le smart contract permettrait d’assurer son respect en informant automatiquement, via la chaîne de blocs, les parties à la cession de titres de l’existence de cette clause et de son nécessaire respect.
- En cas d’inaliénabilité inscrite dans les statuts d’une société, le smart contract permettrait de bloquer la cession des titres si la durée de détention n’est pas atteinte ; le programme informatique rendrait impossible tout mouvement des titres dans la blockchain.
- Pour le paiement des dividendes dès lors que l’événement déclencheur de leur versement serait constaté dans la blockchain.
Les risques à ne pas négliger:
Risques de l’automatisation
Cette technologie est très opportune, mais pas sans danger.
Fonctionnant sur le principe du if-then (condition-conséquence), elle procède d’une automatisation qui fait sa force et sa faiblesse. En effet, le smart contract déclenche ses effets dès qu’une condition est objectivement remplie.
Par exemple, la présence dans les statuts d’une clause d’inaliénabilité des titres pour 5 ans interdit mécaniquement, en présence de ce protocole informatique, de transférer ou d’effectuer une quelconque opération sur les titres concernés avant l’expiration de cette durée. Aucune appréciation subjective n’entre en considération dans le déclenchement du processus informatique. La mise à exécution est mécaniquement liée à la réalisation de l’événement interdit ou encadré. Elle ne tient compte d’aucun standard juridique tels que le raisonnable, la proportionnalité.
Cette absence de tolérance issue de l’automaticité des smart contracts doit donc s’accompagner de mécanismes contractuels permettant de prévenir ses dérives ou dysfonctionnements, comme l’insertion d’une clause de hardship par exemple.
Risques de déséquilibres
Le smart contract peut également être source de déséquilibre entre les parties.
La partie qui propose l’utilisation du smart-contract pourrait en tirer un plus grand bénéfice que son cocontractant, ou même, en serait la seule bénéficiaire.
Risques probatoires
Un risque supplémentaire peut se retrouver dans la force probante des smart contracts exécutés à partir d’une blockchain.
Ces écrits ont la même valeur qu’un écrit papier, ce qui donnerait toute leur force aux actes inscrits sur la blockchain.
Ce n’est pas le cas de la signature électronique qui, pour être valable, doit résulter d’un procédé fiable d’identification.
La blockchain n’est pas conçue pour assurer une telle fiabilité d’identification puisqu’il suffit de s’inscrire de manière anonyme pour recevoir ses clés de signature et effectuer des transactions.
Si vous êtes confronté à une question relative à la blockchain, il est essentiel de vous faire accompagner par des professionnels du droit des affaires. N’attendez pas pour agir et prenez contact avec le cabinet Billand & Messié pour bénéficier d’une assistance juridique sur mesure.
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