Le contrat constituant une société peut parfois comporter quelques rigidités dont les entrepreneurs souhaitent s’émanciper. C’est pourquoi il est parfois judicieux de conclure des conventions qui ont pour objet l’activité sociale mais ne sont pas des contrats de société. Parmi celles-ci, la convention de croupier. Quel est son fonctionnement ? Dans quelles circonstances recourir à une convention de croupier ? Découvrez notre analyse.
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Sommaire
Le fonctionnement de la convention de croupier
Afin de comprendre ce qu’est une convention de croupier, il faut appréhender la nature juridique de ce contrat dans un premier temps. Dans un second temps, il faut remarquer que la convention de croupier procède à une dissociation des prérogatives financières et politiques de l’associé.
Nature juridique de la convention de croupier
La convention de croupier procède à une juxtaposition de liens d’association. Elle est assimilée par la doctrine et la jurisprudence à une société en participation.
Une juxtaposition d’associations
La convention de croupier est le contrat par lequel un associé d’une société (le « cavalier ») convient avec un tiers (le « croupier ») de lui céder une partie ou la totalité de ses droits pécuniaires qu’il détient à l’égard de la société. L’accord des autres associés de la société n’est pas nécessaire. Ainsi au lien de droit établi entre l’associé et la société est juxtaposé en second lien de droit entre le « cavalier » et le « croupier ».
L’assimilation à une société en participation
La doctrine, suivie par la jurisprudence, considère que la convention est une société en participation (son régime aux article 1871 et suivants du Code civil). Le régime fiscal des sociétés de personne s’applique à la condition que la société en participation soit révélée à l’administration.
La dissociation des prérogatives financières et politiques
La convention de croupier consiste en une cession des droits financiers du cavalier. Quelles sont les conséquences de cette opération sur la qualité d’associé ?
Une cession des droits financiers de l’associé
La convention de croupier a pour objet la cession par le cavalier au croupier de tout ou partie de ses droits dans les bénéfices (dividendes, boni de liquidation, etc.). La responsabilité du croupier est définie dans le contrat. Il devra le plus souvent supporter la totalité ou une partie des pertes.
Seuls les droits pécuniaires sont cédés, le cavalier conserve ses droits « politiques » (le droit à l’information, le droit de vote aux assemblées générales, etc.). Une cession qui porterait également sur les droits politiques s’expose à une requalification en cession de titre – opération soumise éventuellement à agrément.
La convention de croupier doit être distinguée de la location de titres sociaux. En effet, elle emporte cession de droits alors que la location d’actions ou de parts sociale ne transfère que la jouissance des titres.
Conséquences sur la qualité d’associé
La convention de croupier n’a aucune conséquence sur les rapports sociaux antérieurs à sa conclusion. Il s’agit là d’une application classique de l’effet relatif des contrats ; le contrat ne crée d’obligations qu’entre les parties (art. 1199 C. civ.). En conséquence, le croupier reste un tiers à l’égard de la société. Pour la Cour d’appel de Paris, les titres sociaux demeurent la propriété du cavalier (CA Paris, 9 avr. 2004).
Quand recourir à une convention de croupier ?
La convention de croupier est le plus souv=ent utilisée pour sa discrétion. Pour autant, la flexibilité offerte par cette opération est telle que la convention de croupier est utile dans de nombreuses autres situations.
La discrétion de la convention de croupier
Le caractère occulte de la convention de croupier en fait un outil récurrent dans les sociétés de personnes.
Le caractère occulte de la convention de croupier
La convention de croupier est occulte par principe. Cela signifie que, sauf révélation, son existence n’est connue que de ses contractants. Les parties décident librement de la révélation ou non de la convention, le plus souvent pour des raisons fiscales. Par conséquent, une convention de croupier peut être conclue afin de dissimuler l’identité d’une personne physique ou morale ; une telle opération est favorable au secret des affaires.
L’utilité dans les sociétés de personnes
La convention de croupier est souvent utilisée dans les sociétés de personne où les parts sociales ne peuvent être cédées qu’après un agrément du cessionnaire. Il en va de même dans les SAS dont les statuts énoncent une clause d’agrément.
Les associés desdites sociétés utilisent cette convention pour se désengager de leurs obligations. Par exemple, un associé d’une SNC qui souhaite ne plus être tenu de contribuer aux dettes peut conclure une convention de croupier alors même que les autres associés s’opposent à la cession des parts du cavalier.
La flexibilité de la convention de croupier
La convention de croupier est tantôt utilisée comme une opération préparatoire, tantôt comme une solution à l’obtention d’un financement.
La convention de croupier comme opération préparatoire
Lorsqu’un investisseur prévoit d’entrer au capital d’une société, il peut souhaiter conclure une convention de croupier avec un ou plusieurs actionnaires en place. Le caractère occulte du contrat permet à l’investisseur de ne pas dévoiler son entrée dans la structure.
Ainsi, la convention de croupier est conclue dans un premier temps. Dans un second, un contrat de cession des titres permet de réunir les pouvoirs pécuniaires et politiques entre les mains du croupier, désormais cessionnaire.
La convention de croupier pour obtenir un financement
La convention de croupier peut être conclue par des associés ou actionnaires qui souhaitent faire face à des difficultés conjoncturelles. Ainsi, le cavalier peut contracter un emprunt auprès du croupier. Par l’effet de la convention, les dividendes perçus par le croupier participent à rembourser le solde et les intérêts du crédit. Une telle opération a régulièrement lieu dans la perspective de consolider une trésorerie.
Désormais, vous en savez davantage sur la convention de croupier et sur la manière dont elle peut être utilisée afin d’optimiser le fonctionnement de votre activité. Si vous souhaitez conclure une convention de croupier ou que vous rencontrez des difficultés quant à son application, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié afin d’obtenir des conseils adaptés à votre situation particulière.
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