Au cours de sa vie sociale, une société peut être confrontée à des circonstances qui l’obligent à repenser la structure de son capital social. La pratique a mis en place des mécanismes permettant de répondre avec efficacités aux difficultés de l’aléa social. Parmi ceux-ci, le « coup d’accordéon ». Cette opération consiste en une réduction de capital suivie concomitamment d’une augmentation de capital. Dans certaines hypothèses, ce dispositif peut remettre en question les droits des actionnaires minoritaires. Nos éclaircissements dans le présent article.
Une demande spécifique ? Un avocat vous recontacte
Sommaire
Une réduction de capital suivie d’une diminution de capital
Le « coup d’accordéon » se révèle utile dans deux hypothèses particulières. Comment l’opération se déroule-t-elle ?
Pourquoi réaliser un « coup d’accordéon » ?
Il est possible de réaliser un « coup d’accordéon » lorsqu’un tiers souhaite entrer au capital ou lorsque le capital social chute en dessous du minimum légal du fait d’une réduction de capital.
L’entrée au capital d’un tiers
Il est parfois nécessaire de réaliser un « coup d’accordéon » lorsqu’un tiers s’apprête à entrer au capital d’une société. En effet, il est probable que l’investisseur souhaite que la société efface ses pertes avant d’injecter des fonds. Cette situation se présente lorsqu’un fonds d’investissement est prêt à apporter de l’argent frais à une société qui rencontre des difficultés conjoncturelles.
La chute du capital social en deçà du minimum légal
Il est possible qu’une réduction de capital entraine une diminution du capital en deçà du minimum légal. Le temps d’un instant, le capital social est inférieur au montant imposé par la loi. C’est pourquoi il est nécessaire de réaliser une augmentation de capital de manière concomitante. Par exemple, le capital social d’une société anonyme (SA) étant de 37 000 euros, « la réduction du capital social à un montant inférieur ne peut être décidée que sous la condition suspensive d’une augmentation de capital » (art. L. 224-2 C. com.).
Le déroulement du « coup d’accordéon »
Le « coup d’accordéon » prend la forme d’une réduction de capital suivie d’une augmentation de capital.
Une réduction de capital…
Dans un premier temps a lieu une réduction de capital. Par exemple, des pertes peuvent être imputées sur le capital social. C’est à ce moment que le capital social peut être réduit à zéro. Par conséquent, les actions ou parts sociales existantes sont annulées.
…suivie d’une augmentation de capital
Dans un second temps, une augmentation de capital est réalisée. De nouvelles actions sont émises en numéraire. L’opération a permis de nettoyer le bilan en faisant disparaitre les pertes comptables et en recapitalisant la société à travers un apport de liquidité.
Pour autant, cette situation financièrement heureuse n’est pas sans mettre en difficulté les associés minoritaires.
La mise en difficulté des associés minoritaires
Si l’opération sociale est en elle-même assez classique, elle pose une difficulté en ce que le capital social peut être réduit à zéro. Afin de protéger les droits des actionnaires minoritaires, la jurisprudence a posé des conditions à la validité de l’opération. Elle limite toutefois les moyens de défense des minoritaires.
Les conditions à la validité du « coup d’accordéon »
Les actionnaires minoritaires pouvant être évincés par l’existence d’un capital social nul, la jurisprudence a énoncé les conditions du « coup d’accordéon »
L’éviction naturelle des actionnaires minoritaires
Lors d’une opération de « coup d’accordéon », il est possible que le capital social soit égal à zéro. Pendant un temps la doctrine s’est interrogée sur la possibilité même d’un capital social nul. La jurisprudence a validé cette hypothèse dans l’arrêt Usinor (Com., 17 mai 1994).
S’est ensuite posée la question de la validité d’un « coup d’accordéon » accompagné d’une suppression du droit préférentiel de souscription (DPS). En effet, l’absence de DPS peut mener à l’éviction des associés dont les parts sont annulées. La chambre commerciale permet la suppression du DPS dans le cadre d’une opération de « coup d’accordéon » dans le respect des conditions de l’article L. 225-135 du Code de commerce (Com., 18 juin 2002, AMY).
Un encadrement par la jurisprudence
Des arrêts Usinor et AMY il est possible de retenir deux conditions à la licéité d’une opération de « coup d’accordéon ». D’une part, la réduction de capital est possible à la condition suspensive d’accomplir une augmentation de capital permettant d’arriver à un montant au moins égal au capital minimum.
D’autre part, l’opération doit être nécessaire à la pérennité ou la survie de la société. De cette manière, si l’opération est réalisée au dessein d’éliminer les associés minoritaires, elle peut être contestée sur le fondement de la fraude (fraus omnia corrumpit) ou de l’abus de majorité.
Les critiques infructueuses des actionnaires minoritaires
La jurisprudence fait preuve d’un libéralisme certain et fragilise la défense des minoritaires en rejetant l’argument de l’expropriation des minoritaires et en constatant l’absence d’augmentation de leurs engagements.
Le rejet de l’argument de l’expropriation
Les minoritaires ont pu essayer de plaider sur le fondement de l’expropriation. Une atteinte au droit de propriété nécessite en principe une décision à l’unanimité des associés. La Cour de cassation a décidé que l’éviction du fait d’un « coup d’accordéon » ne représente qu’une contribution aux pertes anticipées et n’est pas comparable à une expropriation. Ainsi, les associés minoritaires peuvent subir une perte définitive de leur apport alors même que la société n’est pas dissoute.
L’absence d’augmentation des engagements des minoritaires
Les associés minoritaires ont également essayé de se fonder sur l’augmentation des engagements qui nécessite un vote à l’unanimité (art. 1836 C. civ.). La Cour de cassation répond de manière constante qu’il n’existe pas dans le cadre d’une opération de coup d’accordéon une obligation de souscrire à l’augmentation de capital. Par conséquent, l’unanimité n’est pas requise.
En conclusion, le « coup d’accordéon » est une opération sociétaire utile qui permet aux sociétés de s’adapter à des modifications de leur environnement économique et financier. Afin de réaliser une augmentation de capital puis une réduction de capital de votre société dans les conditions les meilleures, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié pour obtenir des conseils juridiques adaptés à vos besoins.
Comments are closed.