Les contentieux entre associés d’une même société peuvent survenir à l’occasion de certaines décisions abusives prises soit par les dirigeants, soit par l’associé majoritaire de la société lors de l‘assemblée générale des associés.
L’associé minoritaire qui s’estime victime d’abus de la part du dirigeant (Président, Directeur général, Gérant…) ou d’un associé majoritaire dispose de plusieurs outils juridiques pour protéger ses intérêts.
Le cabinet d’avocats Billand & Messié vous propose un panorama synthétique des moyens d’actions à disposition de l’associé minoritaire (ou actionnaire minoritaire).
Nos avocats sont à votre disposition pour envisager les moyens d’actions à votre disposition lors d’une première consultation sans frais.
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Sommaire
Catégories de conflits entre Associés
Notre cabinet d’avocats observe principalement la survenance des contentieux suivants, portant sur des aspects tant opérationnels que financiers.
Contrats abusifs conclus par la société au bénéfice exclusif du Dirigeant, de l’Associé Majoritaire ou de toute personne lui étant liée
- L’associé minoritaire se sens parfois lésé par les décisions prises par la société. Le dirigeant peut par exemple attribuer un marché à un prestataire ou fournisseur à des conditions préférentielles, décider d’embaucher des amis ou membres de sa famille, acquérir des biens (immeubles, machines etc…) à un prix surélevé par rapport à leur valeur réelle ; l’objectif est généralement d’avantager de façon opaque des personnes qui lui sont liées.
- Nos avocats observent des situations dans lesquelles l’associé majoritaire détient d’autre sociétés et leur fait facturer des prestations de services (contrat de bail ou prêt d’associé par exemple) à des conditions désavantageuses pour la société, et ce au détriment de l’associé minoritaire.
- Les moyens d’actions? En cas de litige, il convient de garder à l’esprit que les contrats permettant à l’Associé majoritaire d’appréhender, au détriment du minoritaire et de la Société, la trésorerie de la société, relèvent souvent de la procédure des Conventions Réglementées. En outre, l’Abus de Majorité ou l’Abus de Biens Sociaux ainsi que la Faute de Gestion sont susceptibles d’être invoqués.
Absence de distributions de dividendes
- L’associé minoritaire d’une société disposant d’un % du capital inférieur à 50% ne dispose pas du pouvoir de distribuer des dividendes en cas d’existence, à la clôture de l’exercice social, d’un bénéfice distribuable. Or, certains associés majoritaires évitent soigneusement de distribuer des dividendes et se rémunèrent au contraire au moyen d’un contrat de travail ou de contrats de prestation de services (consulting, contrats de licence, etc…).
- Les raisons? La distribution de dividendes bénéficie obligatoirement à l’ensemble des associés, et donc à l’associé minoritaire. Au contraire, en se rémunérant sous forme de prime ou de contrat de prestation de services, le dirigeant et associé majoritaire appréhende la totalité du bénéfice sans reverser une quelconque somme d’argent au minoritaire.
- Les moyens d’actions? Invoquer devant le Tribunal de commerce l’existence d’un Abus de Majorité, faire valoir que le contrat de travail ou de services par l’intermédiaire duquel le dirigeant se rémunère aurait dû être approuvé par l’Associé Minoritaire en tant que Convention Réglementée ou dénoncer une Faute de Gestion du dirigeant.
Gestion opaque ou inappropriée mettant en danger la société
- Notre cabinet d’avocats conseille bon nombre d’associés se plaignant du flou et de l’opacité entourant la gestion de la société par le dirigeant. Le contentieux entre associés est alors lié au manque d’informations transmises à l’associé, et notamment au caractère incomplet du rapport de gestion présenté à l’Assemblée Générale.
- Parfois, le litige porte sur une opération particulière (développement d’un nouveau produit, acquisition d’un actif, cession d’une activité, contrat conclu avec un prestataire de services, partenariat ou lancement d’une joint-venture…) dont l’associé minoritaire connait simplement l’existence mais soupçonne l’intention frauduleuse du dirigeant.
- Dans d’autres situations, l’associé minoritaire dispose d’informations précises mais estime simplement que la décision prise par le dirigeant est inappropriée et dangereuse pour la société ; l’associé minoritaire souhaite ainsi s’y opposer.
- Les moyens d’actions? L’associé minoritaire dispose de la faculté de solliciter l’ouverture d’une Expertise de Gestion qui pourra être suivie de l’engagement d’une Action en Responsabilité du dirigeant.
Abus de majorité
Définition
Ce type de contentieux peut se nouer autour d’une grande variété de situations ; la liste suivante n’a pas vocation à exposer la totalité des cas d’abus de majorité envisageables.
La notion d’abus de majorité, engagée devant le Tribunal de Commerce avec l’assistance facultative d’un avocat d’affaires, permet de sanctionner l’associé majoritaire (ou l’actionnaire majoritaire) qui, en assemblée générale, a adopté des décisions (i) contraires à l’intérêt de la société et (ii) dans l’unique objectif de favoriser les membres de la majorité au détriment des minoritaires.
Cas d’abus de majorité
- Attribution d’une rémunération excessive au dirigeant de la société (CA Grenoble – 6 mai 1964).
- Perception par le dirigeant d’une prime exagérée bien supérieure au bénéfice réalisé par la société, accompagnée de l’absence de distribution de dividendes visant à ne pas rémunérer l’associé minoritaire (Cass. com. – 1er juillet 2003).
- Modification des statuts visant à restreinte la liberté de cession des actions ou parts sociales afin d’empêcher l’associé minoritaire de céder sa participation (Cass.com – 20 février 1957)
- Vente de la totalité des actifs sociaux (meubles, matériel, bail commercial…) à un prix inférieur à la valeur réelle de ces actifs.
- Prise en charge par la société du passif de sa filiale, filiale dans laquelle l’associé majoritaire occupait aussi la fonction de dirigeant (Cass.com – 29-5-1972).
Abus de biens sociaux
L’abus de biens sociaux ( L. 241-3 et L. 242-6 du code de commerce) consiste dans le fait, pour les dirigeants de certaines sociétés, d’user des biens de la société à des fins personnelles et contrairement à l’intérêt social.
La notion d’usage des biens de la société
- L’abus de bien social peut porter sur l’usage par le dirigeant du crédit de la société en lui faisant par exemple supporter la charge d’un emprunt bancaire, d’un cautionnement ou d’une hypothèque.
- L’usage des pouvoirs du dirigeant renonçant à l’attribution d’un marché au profit d’une sociétés lui étant liée, attribuant des commissions à des sociétés lui appartenant, ou faisant pression sur l’expert comptable de la Société pour falsifier les comptes, peut constituer l’abus de bien social.
- L’usage abusif de biens sociaux, tel que le prélèvement d’espèces sur le compte de la société, l’utilisation d’immeubles, de terrains, du matériel ou des marchandises pour le propre compte du dirigeant, est lui aussi sanctionnable.
- En toute hypothèse, le comportement du dirigeant doit être abusif, c’est à dire contraire à l’intérêt de la société, notion bien connue des avocats d’affaires et appréciée au cas par cas.
Un usage réalisé à des fins personnelles et contraire à l’intérêt de la société
Les exemples sont variés, les cas d’abus de biens sociaux suivant peuvent être toutefois listés :
- Prélèvements visant à rembourser un compte courant d’associés et d’un montant supérieur à celui du compte courant, ou prélèvement d’intérêts anormalement élevés.
- Rémunération du dirigeant non autorisée en Assemblée générale ou excessive.
- Dépenses engagées par la société dans l’intérêt exclusif du dirigeant
- Détournement de créances détenues par la société en indiquant au débiteur que le dirigeant en est en fait le créancier, emplois fictifs, perception de commission injustifiées.
- En tout état de cause, l’usage fait des biens sociaux doit l’avoir été à des fins personnelles ou pour favoriser une société ou entreprise dans laquelle le dirigeant est intéressé.
Faute de gestion et responsabilité du dirigeant
La faute de gestion du dirigeant peut être constituée par une simple négligence ou au contraire être intentionnelle et manifestement frauduleuse. Nos avocats en contentieux des affaires observent principalement les fautes de gestion suivantes.
Absence de consultation des associés
- Absence de convocation de l’Assemblée générale d’approbation des comptes annuels.
- Modification du capital social sans consultation de l’Assemblée générale.
- Vente de la totalité des actifs non approuvée par l’Assemblée générale.
Gestion déficitaire et rémunérations abusives
- La réalisation d’un résultat déficitaire n’est fautive que si elle s’accompagne d’une négligence du dirigeant ou d’abus manifestes dans la gestion de la société.
- La fixation de rémunérations abusives et disproportionnées est aussi punissable.
Décisions commerciales ou financières fautives
L’acquisition d’actifs non nécessaires à l’activité, l’embauche de prestataires à des conditions anormales, ou l’endettement réalisé sans réinvestissement des sommes empruntées, ainsi que tout autre décision commerciale ou financière non conforme à l’intérêt social, sont susceptibles de constituer une faute de gestion.
Comportement déloyal du dirigeant
Le dirigeant faisant concurrence à sa propre société commet une faute de gestion. Outre le cas de la concurrence déloyale, le fait, pour un dirigeant, de cacher aux associés minoritaires des informations sensibles et d’en tirer profit peut être sanctionné (exemple : projet de cession d’actions par un associé non révélé aux autres associés afin de permettre au dirigeant des les acquérir par priorité).
Action en responsabilité du dirigeant exercée devant le Tribunal de commerce
L’action en responsabilité peut être exercé au nom de l’associé minoritaire lésé (action ut universi) ou au nom de la société (action ut singuli).
Ces actions en responsabilité du dirigeant sont soumises à des conditions précises, tant en ce qui concerne la procédure applicable que le type de préjudice réparable. Elle débouchent sur l’attribution de dommages et intérêts à l’associé minoritaire (action ut universi) ou à la société (action ut singuli).
Procédure d’approbation des conventions réglementées
Quelles sont les conventions approuvées en Assemblée générale?
- Les conventions conclues, directement ou par personne interposées, entre la société et l’un de ses dirigeants ou l’un de ses actionnaires ou associé disposant d’une fraction des droits de vote supérieure à 10 % doivent être approuvée par l’Assemblée générale ordinaire des associés.
- Le dirigeant ou associé intéressé à la convention n’est pas autorisé à prendre part au vote de l’Assemblée générale. Ainsi, l’associé minoritaire dispose du pouvoir de désapprouver la convention qui lui est soumise. En cas de vote négatif de l’associé minoritaire, les conséquences préjudiciables de la convention litigieuse peuvent être mises à la charge du dirigeant concerné, ce qui nécessite l’engagement d’une action en justice devant le tribunal de commerce.
- Ne sont pas concernées par la procédure d’approbation des conventions réglementées les conventions courantes et conclues à des conditions normales ; une analyse au cas par cas est recommandée afin d’évaluer le caractère « courant » du contrat concerné ainsi que le caractère normal des conditions, notamment de prix, auxquelles celui-ci a été conclu.
Exemples de conventions réglementées soumises au vote de l’Associé minoritaire
Toute convention non courante ou courante mais conclue à des conditions anormales doit être soumise à l’approbation de l’Assemblée générale. Un nombre illimité de cas de figure existe, en ce compris les situations suivantes :
- Vente d’un actif de la société au dirigeant, à une société dans laquelle le dirigeant détient une participation, ou à l’épouse du dirigeant.
- Contrat de distribution ou de fourniture conclu avec une société détenue par le cercle familiale de l’associé majoritaire.
- Cautionnement, par la société, d’un emprunt contracté par une société détenue par le dirigeant.
- Compte courant d’associés permettant à l’associé majoritaire de percevoir des intérêts en l’échange du prêt accordé à la société, etc…
Solliciter une expertise de gestion
L’associé minoritaire souhaitant disposer d’informations sur un acte de gestion litigieux dispose de la faculté de solliciter une expertise de gestion qui permettra de faire lumière sur l’acte en question.
Quel associé est autorisé à solliciter une expertise de gestion?
- L’associé d’une société anonyme (SA) ou une d’une société par actions simplifiée (SAS) doit posséder un nombre d’actions représentant au moins 5% du capital social. Ce seuil est fixé à 10% pour l’associé d’une société à responsabilité limitée (SARL).
- Il est possible, pour plusieurs associés minoritaires, de solliciter l’expertise conjointement en référé devant le Tribunal de commerce, le seuil de 5% étant alors apprécié en additionnant leur % de participation respectifs.
Quelles sont les décisions litigieuses concernées?
- Toutes les décisions prises par les dirigeants peuvent faire l’objet d’une expertise de gestion. Par exemple, l’associé pourra solliciter une expertise portant sur les rémunérations perçues par un dirigeant, sur la conclusion d’un marché, ou encore sur le non respect de la procédure d’approbation des conventions réglementées.
- Toutefois, il est nécessaire d’identifier précisément les actes de gestion concernés par l’expertise, sous peine d’irrecevabilité de la demande. Une demande d’expertise portant sur la gestion au cours d’un semestre ou d’un exercice social sera ainsi rejetée par le Tribunal de commerce.
Procédure applicable
- Dans un premier temps, l’associé minoritaire est tenu de poser des questions écrites au dirigeant portant sur les actes de gestion contestés. Le dirigeant dispose alors d’un délai d’un mois pour répondre à ces questions. En pratique, ces questions doivent être notifiées par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
- A l’expiration de ce délai d’un mois, une action en référé devant le Tribunal de commerce pourra être engagée, à condition que soit précisément identifiés les éléments concernés par l’expertise sollicitée
Exercice des droits d’associés lors de l’Assemblée Générale
Pour l’associé minoritaire en conflit avec le dirigeant ou l’associé majoritaire, l’Assemblée générale est l’occasion d’exprimer son opposition, de solliciter la délivrance d’informations ou de proposer l’adoption de résolutions particulières.
Exercer son pouvoir de blocage
- Société anonyme : un actionnaire détient une minorité de blocage lorsqu’il possède 33,34% des droits de vote de la Société ;
- SARL : un associé dispose d’une minorité de blocage lorsqu’il détient 25% ou 33,34% des droits de vote de la Société (selon les cas) ;
- SAS : la minorité de blocage est fixé à 33,34%, mais notre cabinet d’avocats d’affaires observe une grande variété de statuts prévoyant des % différents (40%, 30%, 25% etc…).
L’exercice d’une minorité de blocage permet de s’opposer à la prise des décisions extraordinaires (modification des statuts, augmentation de capital, entrée d’un investisseur, fusion etc…).
Refuser d’approuver les conventions réglementées
- Il est interdit, pour la personne bénéficiant de la convention réglementée (en l’occurrence l’associé majoritaire), de voter sur l’approbation de la convention concernée.
- L’associé minoritaire est ainsi susceptible de devenir, le temps du vote portant sur la convention en question, un associé « majoritaire » disposant du pouvoir de désapprouver la convention réglementée, ce qui pourra permettre de mettre les conséquences dommageables de la conventions réglementées à la charge de son bénéficiaire (voir ci-dessus).
Poser des questions au dirigeant lors de l’Assemblée Générale et solliciter l’inscription de projets de résolutions à l’ordre du jour
Dans des conditions variant selon le type de société concerné, il est possible pour l’associé minoritaire :
- de poser des questions au(x) dirigeant(s), lequel devra s’expliquer au cours de l’assemblée générale. Ces questions peuvent porter sur la gestion de la société ou sur le caractère incomplet des documents transmis (rapport de gestion, rapports spéciaux etc…) ; et
- de solliciter l’inscription de projets de résolutions à l’ordre du jour, en ce compris des projets portant sur la révocation des dirigeants en place ou la distribution de dividendes.
L’utilité pratique de ces outils peut sembler limitée puisque l’associé majoritaire pourra refuser d’approuver les résolutions proposées par l’associé minoritaire, et répondre aux questions posées de façon suffisamment large. Toutefois, dans le cadre d’un pré-contentieux, il est toujours utile d’utiliser l’ensemble des moyens permettant de manifester son mécontentement et d’obtenir les informations souhaitées sur la société. L’ensemble de ces éléments pourra être produit devant le Tribunal de commerce.
Prévention des conflits par la conclusion d’un Pacte d’Associés
La conclusion d’un pacte d’associés est le meilleur moyen de prévenir la survenance de conflits entre associés et d’offrir à l’associé minoritaire un droit de regard sur certaines opérations significatives afin d’éviter tout abus de la part de l’associé majoritaire et des dirigeants.
Par ailleurs, des mécanismes de résolution des conflits (deadlock) pouvant se solder par le rachat des actions (ou parts sociales) détenues par le minoritaire permettent, en cas de survenance d’un désaccord entre associés, d’acter une séparation à des conditions avantageuses pour l’ensemble des parties.
Pour plus de détails, voir notre article sur les Pactes d’Associés.
Le cabinet Billand & Messié à votre service
Les avocats du cabinet Billand & Messié vous proposent leur expertise en contentieux des affaires tant au stade (i) de la prévention des conflits entre associés que (ii) du traitement des contentieux entre associés. Nos avocats défendent leurs clients devant les Tribunaux de commerce afin de solliciter réparation du préjudice causé à leurs client, et élaborent des stratégies sur-mesure sur validation préalable de leurs clients.
Nos avocats spécialistes du droit des sociétés et du contentieux des affaires restent à votre disposition, la première consultation étant systématiquement offerte.
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