Sont désignées par les termes « management fees » les conventions de prestation de services intra-groupes. À travers ce type de contrats, la société mère facture à ses filiales, ou inversement, des services de nature juridique, fiscale, administrative ou encore financière et comptable.
La convention de management fees définit généralement les conditions et modalités de prestations ainsi que leur mode de rémunération.
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Sommaire
Les conditions de validité propres à la convention de management fees
Du point de vue fiscal
Ces conventions font l’objet d’une attention particulière de la part de l’administration fiscale qui lutte contre les contrats de prestation de services intra-groupes ayant pour unique objectif l’optimisation de leur situation fiscale. En effet, dans l’hypothèse où une société mère facture des prestations à la société fille, celles-ci feront partie du chiffre d’affaires imposable de la société mère et constitueront une charge déductible pour la société fille. Or, la charge ne pourra valablement être déduite que si certaines conditions sont réunies. Dans un premier temps, la charge doit correspondre à un service qui a été effectivement rendu et intervenir dans l’intérêt de la société qui bénéficie de la prestation de services. Enfin, la rémunération doit être proportionnée par rapport aux services exercés. Si ces conditions ne sont pas réunies, la convention est susceptible d’être remise en cause par l’administration fiscale sur le fondement de l’acte anormal de gestion et la déduction fiscale des charges issues des prestations pourra être refusée.
Du point de vue du droit des contrats
Les prestations effectuées ainsi que leurs conditions de rémunération doivent être précisées dans la convention et strictement distinctes de celles du mandat social de celui qui les exerce. À défaut de distinction claire entre les fonctions de prestataire de services et de mandataire social, la convention de management fees encourt la nullité sur le fondement de l’absence de cause, aujourd’hui contrepartie au sens de l’article 1169 du Code civil. Les juges apprécient strictement ces conditions.
La réticence initiale des juges à admettre la validité des conventions de management fees
Depuis l’arrêt Gamlor du 9 octobre 2003, les juges du Conseil d’Etat considèraient que la convention de sous-traitance des fonctions de dirigeant d’une société mère à ses filiales n’était pas admise et entraînait des conséquences pénales et financières telles que le rejet de la déductibilité des sommes versées par la société bénéficiaire de ces services et le rejet de la déduction de la TVA y afférente.
La Cour de cassation elle-aussi se montre sévère face à ces conventions et n’hésite pas à prononcer leur nullité sur le fondement juridique de l’absence de cause de l’ancien article 1131 du Code civil.
Par exemple, dans un arrêt Samco Gestion du 14 septembre 2010, la Cour de cassation annule la convention de management fees ayant pour objet « l’action commerciale, la gestion industrielle, la gestion des ressources humaines, la gestion administrative et financière, stratégie générale, prestation de direction ». Elle rejette dès lors la déduction des management fees et permet un redressement sur le plan fiscal.
De même, est nulle la convention de prestation de services ayant pour objet « des prestations consistant dans la création et le développement de filiales à l’étranger, l’organisation et/ou la participation à des salons professionnels, la définition de stratégie de vente dans différents pays visés et la recherches de nouveaux clients à l’étranger » (Mécasonic, 23 octobre 2012).
Les juges semblent refuser d’admettre la validité des conventions de management fees dès lors qu’elles portent sur des services qui ne sont pas strictement distincts des missions de mandataire social.
Exemple de convention de management fees jugée valide
Pour autant, dans un arrêt du 12 décembre 2018, est jugée valide la convention de management fees conclue entre une société mère bénéficiaire et une société de conseil dont le dirigeant est également celui de la SAS petite-fille du bénéficiaire. Dans cette affaire, la société mère tente d’obtenir la nullité de la convention en démontrant que les fonctions attribuées à la société de conseil n’étaient pas distinctes de celles que le dirigeant de cette société exerçait dans la SAS petite-fille.
La partie demanderesse au pourvoi fonde celui-ci sur la jurisprudence évoquée précédemment. Elle soutient notamment qu’une convention de prestation de services dont l’objet est la mise à disposition d’une personne au profit d’une société pour que celle-ci exerce une mission en son sein est dépourvue de cause, aujourd’hui de contrepartie, lorsque cette personne est le dirigeant de la société et que sa mission contractuelle correspond aux prestations qu’elle doit réaliser au titre de ses fonctions de mandataire social.
La chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi en commençant par relever l’intervention de quatre personnes distinctes et autonomes et considère que les missions confiées à la société prestataire de services ne se confondaient pas avec celles confiées au mandataire social de la SAS. Elle parvient à ce constat en comparant les dispositions relatives aux pouvoirs attribués au dirigeant dans les statuts de la SAS petite-fille de la société bénéficiaire de la prestation avec celles de la convention de management. Il ressort de cette comparaison que les prestations exercées sont différentes ou ne recoupent que partiellement les prérogatives du mandataire.
Elle relève enfin l’absence de rémunération du dirigeant pour ses fonctions de mandataire social tandis qu’il en bénéficie au titre de ses prestations de services.
Dès lors, la convention de management fees est valide.
Vers plus de souplesse ? L’interprétation récente du Conseil d’Etat
L’arrêt du 4 octobre 2023 semble marquer un tournant et donner davantage de souplesse aux contribuables s’agissant de la validité des management fees puisque les juges du Conseil d’Etat considèrent que : « la conclusion par une société d’une convention de prestations de services avec une autre société pour la réalisation, par le dirigeant de la première, de missions relevant des fonctions inhérentes à celles qui lui sont normalement dévolues ne relève pas d’une gestion commerciale anormale si cette société établit que ses organes sociaux compétents ont entendu en réalité, par le versement des honoraires correspondant à ces prestations, rémunérer indirectement le dirigeant et qu’ainsi ce versement n’est pas dépourvu pour elle de contrepartie, le choix d’un mode de rémunération indirect ne caractérisant pas en lui-même un appauvrissement à des fins étrangères à son intérêt ».
Les juges administratifs retiennent, dans cette décision, une nouvelle conception de l’acte anormal de gestion en admettant la validité d’une convention de prestation de services qui, en l’absence d’appauvrissement à des fins étrangères à l’intérêt de la société bénéficiaire, fait pourtant « doublon » avec les fonctions classiquement exercées par le mandataire social.
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