Une cession de titres sociaux est réalisée entre deux parties : un vendeur (le cédant) et un acheteur (le cessionnaire). S’est posée la question de savoir si le cédant pouvait procéder à une cession sans indiquer formellement dans l’acte juridique l’identité du bénéficiaire.
Cette pratique porte le nom de « cession en blanc ». Si elle est singulière, elle n’est pas illicite. Toutefois, les tribunaux ont pu la qualifier d’« imprudente » en ce qu’elle porte atteinte à la sécurité juridique des parties (Versailles, 26 févr. 1988).
Nous vous proposons dans le présent article de préciser les contours de cette notion et de déterminer les limites de son utilisation.
Une demande spécifique ? Un avocat vous recontacte
Sommaire
La conclusion de la cession en blanc
Quelle est l’utilité de la cession en blanc ? Quelles sont ses conditions ? Nos éclaircissements.
Pourquoi la cession en blanc est-elle utile ?
Avant d’illustrer les cas les plus courants de l’utilisation du mandat en blanc, nous vous proposons une définition générale.
Définition de la cession en blanc
La cession en blanc est un acte dans lequel certaines mentions sont laissées « en blanc ». Ces éléments seront complétés par le porteur de l’acte.
Quelles sont les mentions en blanc ?
Les mentions en blanc peuvent être la date de la cession ou le nom du cessionnaire. Plus encore, il est possible que le prix ou le nombre de titres sociaux objets de la cession soient en blanc.
Quand les mentions en blanc doivent-elles être remplies ?
Le porteur de l’acte peut à tout moment remplir les mentions en blanc.
Illustrations
La révocation du dirigeant
Parfois, la fonction du dirigeant est conditionnée à sa possession d’actions de la société. Si ce dirigeant cède en blanc ses titres, le porteur a le pouvoir de le révoquer mécaniquement.
Toutefois, la révocation des dirigeants est souvent soumise à des dispositions légales. Le recours à la cession en blanc pourrait les contourner. Une réserve doit donc être formulée quant à la licéité de cette pratique qui doit être appréciée de manière casuistique.
La garantie d’une créance
Plus simplement, un acte de cession de titres en blanc peut permettre de garantir un engagement du cédant envers le porteur.
Quelles sont les conditions d’une cession en blanc ?
Le consentement du cédant ne doit pas faire défaut. Aussi, les conditions de la cession en blanc sont dépendantes de la nature de l’acte.
Le consentement du cédant
Si pour tout contrat le consentement des deux parties est essentiel, le véritable sujet en matière de cession en blanc est le consentement du cédant. Il doit consentir non seulement à la cession, mais aussi à l’existence de mentions « en blanc ».
Qualification de la cession en blanc
La cession en blanc peut prendre deux formes juridiques.
La cession en blanc comme mandat
D’une part, le contrat de mandat se prête expressément à la réalisation d’une cession en blanc. En effet, la quantité de titres, leur prix ainsi que le nom du cessionnaire ne doivent pas obligatoirement être prévus par le mandant.
Le mandataire, porteur, pourra inscrire ces mentions.
La cession en blanc comme promesse de cession
D’autre part, la cession en blanc peut être qualifiée de promesse de cession. Dans cette hypothèse, le prix et le nombre de titres doivent être déterminables. Néanmoins, le nom du cessionnaire n’est pas une condition de validité. Les juges ont pu en décider ainsi (Paris, 29 sept. 1982).
Les limites à la cession en blanc
La particularité de la cession en blanc nécessite de s’interroger sur son potentiel caractère abusif et sur les complications qu’elle peut engendrer. Explications.
Une cession en blanc peut-elle être abusive ?
La cession en blanc abusive engage potentiellement la responsabilité civile et pénale de son auteur.
Responsabilité civile
Dans la mesure où un acte de cession en blanc serait utilisé de manière contraire à la volonté des parties, son utilisation serait abusive. Par exemple, si le porteur de l’acte de cession en blanc indique un prix qui est déraisonnable, sa responsabilité civile peut être engagée. Il reviendra dans cette hypothèse à celui qui a subi un préjudice – c’est-à-dire le cédant – de démontrer qu’un abus a été commis par le porteur.
Responsabilité pénale
L’« abus de blanc-seing » était une infraction pénale propre qui était codifiée à l’article 407 de l’ancien Code pénal. Engageait alors sa responsabilité pénale toute personne qui abusait d’un blanc-seing qui lui aurait été confié et qui aurait frauduleusement écrit dessus une obligation ou une décharge ou tout autre acte pouvant compromettre la personne ou la fortune du signataire.
Désormais, un tel abus demeure sanctionnable sur le fondement de l’abus de confiance (art. 314-1 C. pén.).
Quelles complications peuvent être induites par une cession en blanc ?
La cession en blanc peut dans certaines situations porter atteinte à l’affectio societatis. Aussi, les conséquences fiscales d’un tel acte ne doivent pas être négligées.
Fragilisation de l’affectio societatis
Si un associé réalise une cession en blanc, il pourrait lui être reproché un manque d’affectio societatis. En effet, une cession en blanc témoigne de la précarité de la qualité d’associé puis est d’une certaine manière incompatible avec « l’intention de s’associer en vue d’une entreprise commune ».
Pour mémoire, l’absence d’affectio societatis des associés d’une société permet de qualifier sa fictivité. La conséquence est la nullité de la société en question.
Conséquences fiscales
La cession en blanc peut remettre en cause l’éligibilité à certains régimes fiscaux.
Par exemple, le gérant d’une SARL ne bénéficie pas d’un régime favorable s’il est majoritaire. Or, le Conseil d’État a décidé qu’étant donné que le gérant était porteur d’une cession en blanc de la part de ses coassociés, il avait de fait le contrôle majoritaire sur la société. Le régime fiscal de faveur ne lui était plus applicable.
Vous savez désormais ce qu’est une cession en blanc et dans quelles mesures elle peut vous être utile.
Si vous souhaitez en savoir davantage sur la cession en blanc ou que vous souhaitez bénéficier d’un accompagnement dans le cadre d’une opération de cession d’actions ou de parts sociales, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié afin de bénéficier de conseils adaptés à votre situation.
Comments are closed.