Par principe, les actions qui forment le capital social d’une société par actions simplifiée (SAS) sont librement négociables. Toutefois, les associés peuvent prévoir des clauses qui restreignent la cession des droits sociaux. Parmi celles-ci se trouvent les clauses d’inaliénabilité. Elles ont pour objet de prévoir l’incessibilité des actions d’une SAS. Les motivations menant à la stipulation d’une telle clause sont diverses :
- protection de la géographie du capital ;
- imposer aux sociétés de capital-risque de conserver leurs actions ;
- respect d’obligations dans le cadre d’un pacte Dutreil…
Les entrepreneurs qui souhaitent recourir à cet outil juridique ont le choix du support dans lequel inclure la clause d’inaliénabilité ; soit un pacte d’associés, soit les statuts de la SAS. Nos éclaircissements pour vous permettre de faire le bon choix.
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Sommaire
Choisir le support de la clause d’inaliénabilité
Le choix du support sur lequel est stipulée une clause d’inaliénabilité doit être réalisé avec attention. Le pacte d’associés est la solution de la flexibilité, les statuts sont la solution de la stabilité.
Stipuler une clause d’inaliénabilité dans un pacte d’associés
Comment les avantages du pacte d’associés encouragent-ils la stipulation d’une clause d’inaliénabilité ? Quelles sont les conditions de sa validité ? Explications.
Les avantages du pacte d’associés pour les clauses d’inaliénabilité
D’abord, le pacte d’associés a l’avantage considérable d’être confidentiel. Contrairement aux statuts d’une société, sa publication n’est pas obligatoire. Les auteurs de la convention peuvent souhaiter que les stipulations interdisant la cession d’actions ne soient pas révélées. Ensuite, le pacte d’associés étant un document contractuel, sa modification est simplifiée. Enfin, une clause extrastatutaire peut stipuler des conditions plus souples que celles qui peuvent être énoncées dans les statuts d’une SAS (v. infra).
Conditions de validité des clauses d’inaliénabilité extrastatutaires
L’article 900-1 du Code civil dispose que les clauses d’inaliénabilité affectant un bien donné ou légué ne sont valables que si elles sont temporaires puis justifiées par un intérêt sérieux et légitime. La jurisprudence précise qu’il appartient à celui qui se prévaut d’une telle clause de justifier l’intérêt sérieux légitime qu’il allègue (Cass. 1re civ. 15 juin 1994).
Si ce texte concerne directement les libéralités, la doctrine et la jurisprudence s’accordent sur le fait que ces conditions s’appliquent aux clauses d’inaliénabilités. Il est donc nécessaire que la clause d’inaliénabilité prévoie un terme à l’issue duquel les actions sont à nouveau cessibles. En effet, les obligations perpétuelles sont proscrites. Une clause qui déclare absolument inaliénable un titre social serait nulle parce que contraire à l’ordre public.
Comparaison : la clause d’inaliénabilité dans les statuts d’une SAS
Une clause d’incessibilité dans les statuts d’une SAS doit respecter des conditions temporelles et être adoptée selon des modalités spécifiques.
Conditions temporelles
L’article L. 227-13 du Code de commerce dispose que les statuts de la SAS peuvent prévoir l’inaliénabilité des actions pour une durée n’excédant pas dix ans. Cette condition de durée renvoie directement au critère de proportionnalité. Donc, contrairement au pacte d’associés qui stipule librement une durée, les statuts imposent une contrainte temporelle.
Toutefois, il n’est pas fait référence à un intérêt sérieux et légitime ; les motifs de l’inaliénabilité n’ont pas à être révélés.
Conditions d’adoption
L’article L. 227-19 du Code de commerce énonce que la clause statutaire visée à l’article L. 227-13 ne peut être adoptée ou modifiée qu’à l’unanimité des associés. Il en va de même dans un contrat ou l’ensemble des signataires doit consentir à sa modification. Toutefois, si la clause statutaire nécessite l’accord de tous les associés, le pacte comprenant une clause d’inaliénabilité peut concerner seulement certains associés.
La portée des clauses d’inaliénabilité
Une clause d’inaliénabilité doit définir précisément son champ d’application. La portée de l’interdiction de cession est également encadrée par la sanction qui résulte de la violation de la clause.
Définir le champ d’application de la clause
Les rédacteurs de la clause d’incessibilité peuvent viser les opérations interdites. La clause précise les titres sociaux qui ne peuvent faire l’objet d’une cession.
Les opérations interdites par la clause
Statutaire ou extrastatutaire, la clause qui interdit la cession peut viser les opérations concernées avec un maximum de précision. Elle peut ainsi permettre certaines aliénations et en proscrire d’autres. Les rédacteurs interdisent ou autorisent donc les donations, les échanges, les cessions, etc.
Les actions concernées par la clause
Les rédacteurs de la clause d’incessibilité sont libres d’interdire l’aliénation de certaines actions seulement. Par exemple, des actions de préférence peuvent faire l’objet d’une interdiction ou d’une autorisation de cession. Il est aussi possible d’imaginer des critères de seuils selon lesquels, par exemple, la cession est proscrite en deçà d’un niveau de participation déterminé dans le capital.
Une différence de sanction selon le support de la clause
Alors que la sanction de la violation d’une clause d’inaliénabilité stipulée dans un pacte d’associés n’empêche pas la formation du contrat, la violation d’une clause statutaire d’inaliénabilité entraine de la nullité de la cession.
Clause d’inaliénabilité extrastatutaire : validité de la cession
Il est de jurisprudence constante qu’une clause d’inaliénabilité est opposable lorsqu’elle affecte un immeuble du fait de la publicité foncière. Il en va différemment lorsque l’interdiction de cession concerne des titres sociaux. En effet, le tiers acquéreur ne peut avoir connaissance du pacte confidentiel. Donc, sauf mauvaise foi de l’acquéreur, la vente est valide. Les cosignataires du pacte d’associés engagent la responsabilité civile de l’associé qui a violé la clause.
Clause d’inaliénabilité statutaire : nullité de la cession
L’article L. 227-15 du Code de commerce énonce que toute cession effectuée en violation des clauses statutaires est nulle. Donc, l’associé qui viole la clause statutaire d’inaliénabilité en cédant ses actions voit le contrat de cession frappé de nullité. Donc, la clause statutaire d’inaliénabilité dans une SAS est juridiquement sécurisée.
Vous pouvez désormais choisir entre le support statutaire ou extrastatutaire pour stipuler une clause d’inaliénabilité. Interdire la cession d’actions d’une SAS est un acte juridique important. Il convient de respecter l’ensemble des conditions posées par la loi afin de permettre à la clause de porter ses effets.
Si vous souhaitez conclure un pacte d’actionnaires ou sécuriser la géographie de votre capital social, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats Billand & Messié pour obtenir des conseils adaptés à votre situation.
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