L’impératif de prévisibilité revêt une importance capitale dans le domaine du droit des contrats, tout particulièrement lorsqu’il s’agit de la cession de titres sociaux, où les implications financières et patrimoniales sont significatives. La liberté contractuelle offre aux parties la possibilité d’aménager leurs accords selon leurs besoins spécifiques.
Parmi les dispositifs les plus utilisés figure la clause résolutoire. Celle-ci permet de prévoir la résiliation automatique et immédiate d’un contrat en cas de manquement d’une partie à ses obligations contractuelles. Quelles sont les conditions de rédaction d’une clause résolutoire ? Quelles sont les modalités de sa mise en œuvre ? Explications.
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Sommaire
Les conditions de rédaction de la clause résolutoire
La clause résolutoire a pour effet de créer une « obligation conditionnelle ». À ce titre, la condition qui réalise la clause résolutoire doit être future, incertaine et licite. Le Code civil proscrit les conditions potestatives.
Une condition future, incertaine et licite
L’article 1304 du Code civil énonce qu’une obligation est conditionnelle lorsqu’elle dépend d’un événement futur et incertain. L’article 1304-1 du même code ajoute que la condition doit être licite. La sanction du non-respect de ces prescriptions est la nullité.
Un événement futur
Un événement est futur lorsque celui-ci ne s’est pas encore réalisé. La Cour de cassation décide que l’obligation n’est pas conditionnelle si l’événement visé dans la clause résolutoire s’est déjà réalisé (Cass. com., 6 mars 1973). Si cela peut relever de l’évidence, il faut toutefois souligner que la connaissance ou non par les parties de la survenance de l’événement est sans influence.
Un événement incertain
L’incertitude est le deuxième caractère essentiel de la clause résolutoire. En effet, c’est cette contingence qui distingue la condition du terme. Par exemple, la Cour de cassation rappelle que la clause « si je peux » est une condition alors que la clause « quand je pourrai » est un terme (Cass. 1re civ., 13 avr. 1999). Il est alors absolument nécessaire de veiller à la précision de la rédaction de la clause résolutoire.
Un événement licite
La clause résolutoire ne peut comporter une condition illicite. Si la conformité aux bonnes mœurs a été abandonnée par le droit, l’exigence de licéité renvoit à la conformité des obligations contractuelles à l’ordre public.
Le rejet d’une condition résolutoire potestative
Le Code civil dispose en son article 1304-2 qu’est nulle l’obligation contractée sous une condition dont la réalisation dépend de la seule volonté du débiteur. Toutefois, la jurisprudence tolère des clauses dites « mixtes ».
La potestativité interdite
L’interdiction de la potestativité signifie que l’événement ne peut dépendre de la volonté d’une des parties. La Cour de cassation a mis en lumière des indices permettant d’identifier l’existence d’une clause potestative (Cass. com., 20 sept. 2011). Il en va ainsi lorsque la condition est purement discrétionnaire, que l’événement dépend de la seule volonté d’une partie, « et non de circonstances objectives qui seraient susceptibles de contrôle juridictionnel ». Une condition potestative est par principe nulle. Toutefois, il existe une marge de manœuvre avec les clauses mixtes.
La mixité d’une clause tolérée
Une condition qui permet l’influence de la volonté d’une partie n’est pas automatiquement nulle. En effet, la volonté des parties est admise lorsque l’événement envisagé doit aussi sa réalisation à la volonté d’un tiers ou à un événement extérieur. Dans cette hypothèse, il est recommandé d’exiger dans la clause un comportement spécifique de la partie. Par exemple, il est possible de stipuler que la partie doit « faire ses meilleurs efforts ».
La mise en œuvre de la clause résolutoire
Si le contrôle de la clause résolutoire des juges est limité, il n’en demeure pas moins que la réalisation de celle-ci est soumise à des modalités strictes. Que retenir ?
La réalisation encadrée de la condition résolutoire
La clause résolutoire fait l’objet d’une mise en œuvre potestative au bénéfice du créancier de l’obligation. Les effets de la condition résolutoire sont rétroactifs.
Le déclenchement potestatif de la clause résolutoire
Conformément à l’article 1224 du Code civil, la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse. Toutefois, il peut être convenu que la résolution résulte du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure produit ses effets si et seulement si elle mentionne clairement la clause résolutoire.
Le créancier dispose du droit potestatif d’activer ou non la clause résolutoire (Cass. 3e Civ., 1er juin 2011). Cela signifie qu’il peut décider de ne pas obtenir la résolution du contrat. En effet, celle-ci étant stipulée en sa faveur, il peut y renoncer. Il reste toutefois recommandé de préciser cet élément dans la clause.
La mise en œuvre rétroactive
L’extinction de l’obligation du fait de l’activation d’une clause résolutoire est en principe rétroactive. Pour autant, les parties peuvent décider que les effets de la résolution ne valent que pour l’avenir.
Le contrôle limité des juges sur la clause résolutoire
Les juges font une application automatique de la clause résolutoire et ne réalisent en conséquence pas de contrôle sur son contenu. Toutefois, si la rédaction de la clause est imprécise, les juges recouvrent leur pouvoir d’interprétation.
Application automatique et absence de contrôle
Les clauses résolutoires doivent exprimer de manière non équivoque la commune intention des parties de mettre fin de plein droit à leur convention (Cass. 3e Civ., 12 oct. 1994). Par conséquent, il n’est pas attendu des juges qu’ils apprécient la gravité du manquement visé mais davantage qu’ils s’assurent de la réalisation de l’événement (Cass. Com., 14 déc. 2004). La bonne foi du débiteur n’a pas d’incidence sur l’acquisition de la clause résolutoire (Cass. 3e Civ., 24 sept. 2003).
L’interprétation judiciaire en cas d’imprécision de la clause résolutoire
Dans un arrêt du 25 novembre 1986, la première chambre civile de la Cour de cassation a énoncé que le contenu de la clause doit être clair et précis sans quoi les juges recouvrent leur pouvoir d’interprétation. Pour rappel, « dans le doute, le contrat de gré à gré s’interprète contre le créancier et en faveur du débiteur, et le contrat d’adhésion contre celui qui l’a proposé » (art. 1190 C. civ.). Donc, il est utile d’appeler les rédacteurs d’une clause résolutoire à la plus grande vigilance.
Pour conclure, la clause résolutoire est un outil contractuel utile pour toutes les parties qui souhaitent sécuriser leurs transactions, dans le cadre d’une cession d’actions ou de parts sociales par exemple. Si vous souhaitez en savoir davantage sur la clause résolutoire, ses conditions de rédaction et sa mise en œuvre, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié afin d’obtenir des conseils adaptés à votre situation.
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