Les entrepreneurs sont régulièrement confrontés à la réalisation d’opérations sociétaires. Une des plus courantes est la transmission universelle de patrimoine (parfois appelée TUP). Elle consiste en la transmission de l’actif et du passif d’une société au bénéfice d’une autre. Cette opération est réalisée dans les circonstances d’une fusion-absorption. Dès lors, une question : qu’en est-il de la transmission d’une caution lorsqu’est réalisée une fusion-absorption ? Il convient d’examiner les situations relatives aux bénéficiaires de la caution (créanciers et débiteurs) et les situations relatives à la société caution.
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Sommaire
Absorption de la société créancière ou débitrice de la caution
Lorsqu’une société créancière ou une société débitrice est absorbée, la conséquence juridique est identique. Si l’obligation de règlement est maintenue, l’obligation de couverture s’éteint. Explications.
L’obligation de règlement maintenue
La jurisprudence puis le Code civil ont imposé la persistance de l’obligation de règlement dans l’hypothèse d’une transmission universelle de patrimoine (TUP). Que ce soit le créancier de qui soit absorbé ou le débiteur, la solution est analogue.
Avant le Code civil : une jurisprudence constante
Avant que ses décisions ne soient codifiées par la réforme du droit des sûretés en 2021 (Ordonnance du 15 septembre 2021), la jurisprudence affirmait déjà de manière constante que lorsque la société débitrice principale ou créancière de la caution est absorbée, l’obligation de règlement n’est pas affectée par la fusion (Cass., com., 8 nov. 2005).
L’article 2318 du Code civil dispose désormais qu’en cas de dissolution de la personne morale débitrice ou créancière par l’effet d’une transmission universelle de patrimoine, la société caution demeure tenue pour les dettes nées avant que l’opération ne soit devenue opposable aux tiers. Que retenir de ce texte ?
Une solution identique pour les créanciers et débiteurs
Les praticiens sont confrontés à deux situations qui sont traitées de la même manière.
D’une part, lorsque la société débitrice contracte une obligation avant la transmission universelle de son patrimoine, la personne qui lui a accordé cette garantie demeure obligée.
D’autre part, si la société créancière est absorbée, la caution est obligée aux dettes de la société débitrice nées antérieurement à la fusion, au bénéfice de la société absorbante.
Le critère temporel est celui de la publicité légale de la fusion. Autrement dit, les dettes garanties après la transmission universelle de patrimoine (TUP) sont celles antérieures aux formalités qui ont rendu opposable aux tiers la fusion.
L’obligation de couverture éteinte
L’article 2318 du Code civil énonce que la société débitrice ne garantit les dettes nées postérieurement à la fusion que si elle y a consenti à l’occasion de cette opération et qu’il en va de même pour la société créancière si elle y a consenti par avance. L’article précise qu’une manifestation contraire de volonté est possible.
Situation des dettes nées postérieurement à la fusion
Avant le Code civil, la jurisprudence rappelait de manière constante deux solutions.
D’une part, concernant la société créancière de la caution, son absorption entraînant la disparition de cette société, les cautionnements consentis au profit de la société absorbée ne peuvent, pour les dettes nées postérieurement à la fusion, être étendus en faveur de la société absorbante (Cass., com., 17 juill. 1990).
D’autre part, concernant l’absorption de la société débitrice, en cas de fusion de sociétés donnant lieu à la formation d’une personne morale nouvelle, l’obligation de la caution qui s’était engagée envers l’une des sociétés fusionnées n’est en principe pas maintenue pour la garantie des dettes postérieures à la fusion (Cass., com., 20 janv. 1987).
Le critère temporel permet encore de distinguer l’obligation de règlement (maintenue, v. supra) et de couverture (éteinte). Ainsi, dès lors que les formalités de publicité légale rendent la transmission universelle de patrimoine opposable aux tiers, toute obligation nouvelle n’est plus inscrite dans le champ du cautionnement.
La possible manifestation de volonté contraire
Le Code civil et la jurisprudence posent une exception à l’extinction de l’obligation de couverture. Celle-ci repose sur le fondement de la liberté contractuelle.
La caution peut en effet décider de maintenir sa garantie. Il est nécessaire toutefois d’opérer une distinction. Lorsque les opérations portent sur la société débitrice, la caution doit consentir « à l’occasion de l’opération ». Lorsque les opérations portent sur la société créancière, la caution doit consentir « par avance ».
La manifestation de volonté est explicite ou implicite. La Cour de cassation a considéré que le paiement spontané par la caution de dettes nées après la fusion valait consentement au maintien de l’obligation de couverture (Cass., com., 25 sept. 2019).
Absorption de ou par la société cautionnée
Les situations relatives à la société caution regroupent deux hypothèses. Premièrement une absorption de la société caution et deuxièmement une absorption par la société caution.
Absorption de la société caution
L’hypothèse de l’absorption d’une société caution pose moins de difficultés en ce qu’elle ne constitue qu’une application classique du régime de la transmission universelle de patrimoine.
Avant l’Ordonnance réformant le droit des sûretés, les juges de cassation disposaient que la société absorbante est tenue d’exécuter l’engagement de la société caution absorbée (Cass., com., 7 janv. 2014).
L’article 2318 énonce désormais qu’en cas de TUP d’une personne morale caution, toutes les obligations issues du cautionnement sont transmises. Donc, la société absorbante doit être dûment informée des différentes cautions auxquelles est engagée la société absorbée ; elle y sera elle-même obligée.
Absorption par la société caution
L’absorption par la société caution ne devrait poser aucune difficulté car aucune personne morale ne disparait. Toutefois, l’hypothèse dans laquelle l’absorbante est caution de l’absorbée mérite notre attention. Dans cette situation, la société absorbante reste tenue après l’absorption dans la limite de la dette principale constatée au jour de la fusion sous réserve de l’imputation des paiements effectués postérieurement par le débiteur principal (Paris, 4 juin 1993).
Pour conclure, il est nécessaire de distinguer les différentes hypothèses afin de comprendre le sort des cautions lors des transmissions universelles de patrimoine. Si vous envisagez de réaliser une fusion-absorption ou toute opération entraînant une transmission universelle de patrimoine (TUP), vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié afin d’obtenir des conseils personnalisés pour optimiser la réalisation de votre opération.
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