Les entrepreneurs sont régulièrement confrontés à des situations dans lesquelles des augmentations de capital s’imposent. Or, celles-ci peuvent avoir un effet dilutif qui détériore les droits financiers des actionnaires en place.
Le Code de commerce propose alors la mise en place d’une prime d’émission pour pallier la dilution financière des augmentations de capital. Découvrez de quelle manière mettre en place une prime d’émission et comment déterminer son montant idéal.
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Sommaire
La mise en place de la prime d’émission
La réflexion sur l’opportunité de mettre en place une prime d’émission doit être systématique lorsqu’il est question de réaliser une augmentation de capital. La détermination du montant de la prime d’émission dépend de la situation financière et comptable de la société.
Pourquoi mettre en place une prime d’émission ?
La prime d’émission a pour objet de limiter la dilution financière des actions. Elle est facultative.
Limiter la dilution financière des actions
La réalisation d’une augmentation de capital en numéraire emporte une dilution financière des actions. En effet, les capitaux propres de la société sont partagés entre les actionnaires en place et les souscripteurs. Or, lorsque la souscription a lieu à la valeur nominale, les néo-entrants bénéficient instantanément des sommes en réserves et des plus-values latentes.
La prime d’émission corrige cette dilution en faisant supporter aux souscripteurs le paiement d’une somme visant à neutraliser la dévaluation des actions anciennes. Ainsi, les nouveaux actionnaires ne bénéficient pas, sans contrepartie, de la bonne santé financière de la société.
Un complément d’apport facultatif
Contrairement au droit préférentiel de souscription qui est en principe obligatoire dans le cadre d’une augmentation de capital, la mise en place d’une prime d’émission est par principe facultative. L’article L. 225-128 du Code de commerce énonce effectivement que les titres de capital nouveaux sont émis soit à leur montant nominal, soit à ce montant majoré d’une prime d’émission. Il revient donc à l’assemblée générale extraordinaire de décider de la mise en place ou non d’une prime d’émission.
La détermination du montant de la prime d’émission
La détermination du montant de la prime d’émission nécessite une valorisation de la société afin de distinguer la valeur réelle et nominale des actions. Les perspectives d’évolution de la société peuvent être aussi prises en compte dans le calcul de la prime d’émission.
La nécessaire valorisation de la société
La juste détermination du montant d’une prime d’émission nécessite a priori une valorisation de la société pour laquelle une augmentation de capital est envisagée. La prime étant destinée à corriger la dilution financière, il faut justement établir la valeur réelle de la société à un moment donné. Le bilan comptable (lu à la lumière des recettes latentes) est à ce titre l’outil indispensable à la détermination de la valeur de la SA.
Valeur nominale et réelle des actions
Une fois la valeur réelle de la société déterminée, il est nécessaire de diviser ce montant par le nombre d’actions de la société. Ainsi est obtenue la valeur réelle d’une action. La différence entre la valeur réelle du titre et sa valeur nominale énoncée dans les statuts correspond à la valeur de la prime d’émission pour une nouvelle action émise. Si ce montant est retenu, la prime permet de pallier l’effet dilutif de l’augmentation de capital en numéraire.
Considération des perspectives de la société
La valeur réelle de la société à un moment donné ne permet pas toujours de déterminer la valeur à court ou moyen terme de celle-ci. En effet, une prime d’émission limitée à la différence entre la valeur réelle et la valeur nominale des titres n’est pas toujours optimale lorsque la société connait une forte croissance. Il est donc possible d’augmenter davantage la prime d’émission dès lors que sont considérées certaines limites.
Les limites au montant de la prime d’émission
Il n’existe pas de texte qui encadre la détermination du montant de la prime d’émission. Toutefois, la jurisprudence a précisé que la prime devait correspondre à la situation réelle de la société. De la même manière, le droit commun de l’abus de majorité constitue une limite à la libre détermination du montant de la prime d’émission.
Une prime qui correspond à la situation réelle de la société
Le principe d’une prime d’émission au montant illimité est confronté à l’exception de la fraude.
Le principe d’un montant illimité
La chambre commerciale de la Cour de cassation dans son arrêt Château Giscours a énoncé qu’il n’existait par principe pas de limite au montant de la prime d’émission. Toutefois, la prime doit correspondre à la situation réelle de la société. Par exemple, l’appréciation des perspectives économiques de la société ne doit pas être déraisonnable.
L’exception de la fraude
En droit, il est régulièrement rappelé que la « fraude corrompt tout » (fraus omnia corrumpit). La Cour a affirmé qu’une prime d’émission au montant délibérément élevé ayant pour objet d’évincer les associés minoritaires en les dissuadant de souscrire à l’augmentation de capital était illicite.
L’outil de l’abus de majorité à la disposition des minoritaires
Les minoritaires peuvent recourir au droit commun de l’abus de majorité si l’absence de prime d’émission ou si son montant important induit une contrariété à l’intérêt social et une rupture d’égalité entre associés (Cass., com., 9 mars 1993, Flandin). Le coup d’accordéon illustre les dangers associés à une telle opérations pour les minoritaires.
La contrariété à l’intérêt social facilement prouvée
La contrariété à l’intérêt social peut résider dans l’effet dilutif d’une augmentation de capital sans prime d’émission. En effet, les actions perdent de la valeur. Dans l’hypothèse d’une prime d’émission trop élevée, la jurisprudence a pu parfois assimiler à la contrariété à l’intérêt social l’absence d’intérêt social (par exemple, concernant les mises en réserves systématiques).
La rupture d’égalité difficilement démontrable
La rupture d’égalité entre les associés majoritaires et minoritaires peut être difficile à prouver. La mise en place d’une prime d’émission concerne tous les souscripteurs par principe. Toutefois, si les associés se réservent la possibilité de souscrire à l’augmentation de capital en supprimant le droit préférentiel de souscription, l’abus de majorité est aisément établi.
En conclusion, l’augmentation de capital dans une SA nécessite généralement la mise en place d’un droit préférentiel de souscription. Si vous envisagez une augmentation de capital et souhaitez optimiser votre opération, vous pouvez contacter le cabinet d’avocats d’affaires Billand & Messié. Ils vous fourniront des conseils personnalisés et adaptés à vos problématiques.
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