Il est courant, pour un salarié, d’envisager la création de sa propre entreprise et la rupture de son contrat de travail. Une grande minorité seulement de salariés franchissent le pas face aux risques générés par une telle démarche.
Le premier écueil auquel fait face le salarié est celui lié à l’incertitude qui entoure les rendements de sa future activité : lui permettra-t-elle de subvenir à ses besoins courants durant les premiers mois ? Dispose-t-elle de perspectives de croissance justifiant la prise de risques initiale ?
En second lieu, quand bien même le futur entrepreneur croit en la réussite de son projet, plusieurs incertitudes pourront le dissuader de tenter l’aventure : suis-je autorisé à concurrencer mon employeur actuel, comment pourrais-je financer le lancement de mon activité, où pourra se situer le siège de mon entreprise, quel sera la forme juridique la plus adaptée à l’activité envisagée?
Le présent article vise à délivrer des conseils pratiques aux salariés candidats à la création d’entreprise.
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Sommaire
Maitriser les contraintes liées au droit de la concurrence
Interdiction de concurrencer l’entreprise avant la rupture du contrat de travail
Un salarié qui envisage de lancer son activité n’est pas autorisé à exercer cette activité tant que le contrat de travail n’est pas effectivement rompu.
Le salarié est en effet systématiquement lié par une obligation de loyauté envers son employeur impliquant l’interdiction, pour un salarié, de concurrencer son propre employeur. Le non-respect de cette interdiction exposera le salarié à un licenciement pour faute grave ou lourde, voire à une action en responsabilité l’obligeant à cesser l’activité concurrente et à réparer la perte de marge causée à son employeur.
Il convient de garder à l’esprit que l’obligation de loyauté existe même en l’absence de clauses spécifiques comprises le contrat de travail.
Existence éventuelle d’une clause de non-concurrence applicable après la rupture du contrat de travail
Le salarié est invité à prendre connaissance avec attention des stipulations de son contrat de travail. En effet, quand bien même il notifie à son employeur sa démission, respecte un préavis suffisant et ne lance son activité qu’une fois le contrat de travail rompu, une clause de non-concurrence peut venir restreindre sa liberté d’établissement post-rupture.
La clause de non concurrence figurant dans un contrat de travail n’est valide qu’en cas de respect des conditions suivantes :
- Le clause doit prévoir une indemnisation du salarié durant la période de non concurrence ;
- La clause doit être nécessaire à la protection des intérêts de l’entreprise ;
- La clause doit être limitée dans le temps et doit comprendre des limitations territoriales ;
- Les stipulations doivent être adaptées aux spécificités de l’activité.
En cas d’existence d’une clause de non-concurrence, quatre possibilités existent :
- Respecter la clause et lancer une activité dans un secteur non concurrent ;
- Contester la validité de la clause de non-concurrence sur les fondements visés ci-dessus ;
- Renégocier avec son employeur la clause de non-concurrence, ce qui sera envisageable en cas de doute quant à sa validité ;
- Ne pas respecter la clause et prendre le risque d’une action en responsabilité ultérieure engagée par l’entreprise concurrencée.
En l’absence de clause de non-concurrence, le salarié reste lié par l’interdiction de concurrencer déloyalement son ancien employeur
Le créateur d’entreprise est parfois conduit à s’implanter dans un marché caractérisé par une forte intensité concurrentielle. Or, toute société ou entrepreneur s’expose à des sanctions en cas d’exercice d’une concurrence déloyale, d’où la nécessité de veiller à ne pas nuire illicitement à ses concurrents.
Les actes de concurrence déloyale sont les suivants :
- Dénigrement : critiquer publiquement et de manière injustifiée ses concurrents ;
- Confusion : entretenir une confusion dans l’esprit du public entre son entreprise et une entreprise concurrente en laissant croise à la clientèle l’existence d’une seule et unique entreprise ;
- Désorganisation : débaucher massivement les salariés et clients de ses concurrents ;
- Parasitisme : profiter sans efforts et déloyalement des travaux réalisés par les concurrents.
Pour une description détaillée des règles liées à la concurrence déloyale, nous vous renvoyons à notre article dédié.
Contraintes liées au respect des droits de propriété intellectuelle
Le salarié devra veiller à ne pas contrefaire les brevets, dessins et modèles de son employeur. Par ailleurs, lorsque l’activité de son employeur est susceptible d’être protégée par des droits d’auteurs, l’entrepreneur prendra soin de ne reproduire servilement les chartes graphiques, dessins ou textes produits par son ancien employeur.
Les situations doivent être analysées au cas par cas. En synthèse, l’activité créée doit être suffisamment originale dans son principe ou dans ses conditions d’exercice et de commercialisation. L’ex-salarié doit ainsi veiller à produire les efforts qui lui permettront de différencier son activité de celle de son ancien employeur.
Le risque généré par la violation des droit d’auteurs, brevet, dessin et modèle d’un concurrent est celui d’une action en contrefaçon pouvant déboucher sur le versement d’importants dommages et intérêts et/ou sur des poursuites pénales.
Option pour la création d’une société ou pour l’auto-entreprise
Après avoir validé la légalité du projet de création au regard des règles de droit de la concurrence et de propriété intellectuelle, le fondateur doit s’assurer de sélectionner la structure juridique la plus adaptée à son activité.
Avantages liés à la création d’une société
La création d’une société est recommandée par nos avocats dans plusieurs cas de figure.
En premier lieu, lorsque l’ancien salarié envisage de s’associer avec un partenaire, la création d’une société permet de formaliser la relation et de fixer les règles de répartition des bénéfices, de financement de l’activité et de rémunération. Un pacte d’associés pourra définir en détails les conditions de la relation. La création d’une société permet en outre de lever des fonds auprès de personnes physiques ou de sociétés. A cet égard, la création d’une SAS offre toute la flexibilité nécessaire à ce type d’opérations (contrairement à la SARL dont la structure est plus contraignante).
En second lieu, en présence d’une clientèle composée d’entrepreneurs (B2B), la création d’une société permet de crédibiliser l’offre et de rassurer ses interlocuteurs quant à la solidité du projet, à l’expérience de l’entreprise et au savoir-faire de son fondateur. Par conséquent, même en l’absence de plusieurs associés, il est courant de créer des sociétés unipersonnelles (comprenant un seul associé) sous forme de SASU ou de SARL Unipersonnelles (aussi dénommées EURL).
En troisième lieu, la création d’une société peut être imposée par des contraintes règlementaires (en fonction de l’activité envisagée) et par des considérations comptables et fiscales : le candidat à la création d’entreprise doit comparer les avantages et les coûts respectifs du statut d’auto-entrepreneur et de dirigeant associé d’une société. En règle générale, le statut d’auto-entrepreneur est l’outil idéal pour lancer l’activité et tester sa rentabilité. Toutefois, certains business-models – notamment ceux comprenant un volume de charges élevé (recours à des sous-traitants, achat-revente etc…) – peuvent rendre avantageux la création initiale d’une SASU ou d’un EURL.
Fixer le siège de l’entreprise
Le siège social de la société créée peut être situé provisoirement au domicile du fondateur ou d’un des associés, à condition que le contrat de bail d’habitation et/ou le règlement de copropriété n’interdise pas l’exercice de l’activité en question.
Les entreprises nouvellement créées peuvent aussi opter pour la conclusion d’un contrat de domiciliation de leur société auprès d’une entreprise spécialisée afin de pouvoir « afficher » une adresse prestigieuse, ou tout simplement une adresse française dans le cas où le fondateur est expatrié. Le coût d’un contrat de domiciliation varie généralement entre 50 et 300 euros / mois.
Ces solutions permettent d’éviter au créateur la location de véritables bureaux et le paiement de loyers élevés pendant la phase de lancement.
Assurer le financement du lancement de l’activité
Le financement de l’activité peut être réalisé par un apport de fonds propres à l’entité créée, réalisé par le fondateur ou par un associé (business angel), par un établissement bancaire ou par un prêteur particulier (qui souscrira alors des titres obligataires, aussi dénommés « obligations », émis par la SAS). Dans le cadre d’un financement bancaire ou d’un financement obligataire, le fondateur sera généralement contraint de se porter caution personnelle.
L’établissement d’un business plan est un préalable nécessaire permettant de chiffrer le besoin en financement initial, la capacité d’autofinancement du projet ainsi que les besoins de financements ultérieurs.
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