La répartition du capital d’une société est la première question posées aux futurs associés. Or, le pourcentage de capital attribué à chaque associé au lancement d’une société est un élément décisif d’un point de vue financier et décisionnel.
Notre cabinet d’avocats vous propose une explication des enjeux liés à la répartition du capital social et des possibilités offertes aux fondateurs d’une société.
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Sommaire
Quels sont les enjeux liés à la répartition du capital social
Aspects politiques : contrôler l’assemblée générale et exercer les fonctions de dirigeant
En principe, sauf si les statuts le prévoient autrement, deux seuils sont essentiels : le seuil de 51% (en réalité 50% + 1 voix) et le seuil de 2/3 du capital (en réalité 2/3 + 1 voix).
Incidences de la détention de plus de 50% du capital social
La détention de plus de 50% du capital social d’une société permet de contrôler les décisions prises par l’Assemblée générale ordinaire des associés. Or, l’Assemblée générale ordinaire est en principe dotée de pouvoirs clefs, à savoir notamment :
- nommer et révoquer les dirigeants de la société, et fixer leur rémunération.
- approuver les comptes de la société, en affecter les bénéfices (dividendes ou mise en réserve) et les pertes.
- approuver les contrats conclus entre la société et un dirigeant ou un associé significatif.
Par conséquent, l’associé détenant plus de 50% du capital – par exemple 501 actions d’une société dont le capital est composé de 1000 actions – sera à en position de nommer ses dirigeants (Président et Directeur général d’une SAS, Gérant d’une SARL, Conseil d’administration d’une SA…).
Or, le Dirigeant d’une société est investis des pouvoirs les plus larges pour agir en toutes circonstances au nom et pour le compte de la société. La seule limitation à ses pouvoirs trouve en principe son origine dans les pouvoirs réservés à l’assemblée générale ordinaire (voir ci-dessus) et à l’assemblée générale extraordinaire (voir ci-dessous).
En pratique, et sauf restriction par les statuts ou le pacte d’associés, l’associé majoritaire disposera des pouvoirs suivants par l’intermédiaire du dirigeant qu’il nommera (à savoir lui même ou une personne de confiance) :
- déterminer la politique d’embauche
- fixer la stratégie commerciale et marketing
- orienter la politique d’achat et d’investissement
- souscrire des emprunts
- conclure des partenariats
- créer des établissements et des filiales, etc…
L’associé majoritaire, en nommant et en révoquant les dirigeants, dispose ainsi d’un contrôle total sur la gestion courante de la société.
Incidences de la détention de plus de 2/3 du capital social
Détenir plus de deux tiers du capital permet en principe de contrôler l’assemblée générale extraordinaire de la Société. Or, cette assemblée est seule compétente pour adopter les décisions suivantes :
- augmentation, amortissement ou réduction de capital. Cela concerne notamment la réalisation de levées de fonds auprès des associés ou de nouveaux investisseurs.
- fusion, scission, apport partiel d’actif : cela vise en pratique la réorganisation de la société, l’adossement de la société à une entreprise ou un groupe, etc…
- transformation de la Société en une autre forme sociale : par exemple, transformation d’une SA ou d’une SARL en SAS.
- dissolution ou prorogation de la durée de la Société.
- toute modification des statuts de la Société.
Ainsi, l’associé qui détiendrait 667 actions sur un total de 1000 actions sera habilité à prendre l’ensemble de ces décisions clefs.
Inversement, un associé détenant plus d’un tiers du capital social de la société (par exemple 334 actions sur un total de 1000 actions) disposera d’une minorité de blocage lui permettant de valider l’ensemble de ces opérations extraordinaires, en ce compris toute opération potentiellement dilutive.
Aspects financiers : pourcentages du capital, dividendes et prix de revente
Outre les aspects politiques, le pourcentage de participation au capital comporte des incidences financières significatives.
Distribution des dividendes
Le montant des dividendes perçus par les associés est proportionnel au nombre d’actions détenues. Par conséquent, un associé détenant 51% d’une société distribuant 100.000 euros de dividendes percevra une somme totale de 51.000 euros.
Au sein des SA et SAS, il est possible de déroger à cette proportionnalité par l’émission d’actions de préférence disposant de droits préférentiels sur les distributions de dividendes. Diverses formules sont pratiquées par notre cabinet d’avocats (dividende prioritaire, super dividende, etc…).
Répartition du prix de vente de la Société
La répartition du prix de vente de la totalité du capital d’une société sera réalisée proportionnellement au % détenu par chaque associé.
Ici aussi, la création d’actions de préférence de différentes catégories permet de prévoir la perception, par un associé, d’une portion plus importante du prix de revente de la Société. L’action de préférence permet ainsi de décorréler le montant du prix perçu du pourcentage détenu par l’associé, ce qui est une pratique courante dans de nombreuses start-up et biotech.
En cas de liquidation de la société et d’existence d’un boni de liquidation, ce dernier sera aussi réparti proportionnellement au pourcentage de capital détenu, sauf existence d’actions de préférence comportant des droits prioritaires sur le boni de liquidation.
Quels sont les principes applicables pour répartir le capital d’une société?
La répartition du capital est librement décidée par les associés. Ceux-ci peuvent prendre en considération plusieurs éléments pour s’accorder sur la répartition.
Critères utiles à la répartition du capital
Investissement financier de l’associé
En premier lieu, le montant apporté en capital ou par un apport en compte courant d’associé pour financer le lancement de l’activité doit être pris en considération. En effet, cette prise de risque financier doit être récompensée par l’attribution d’un % adapté.
Lorsque le projet nécessite un financement initial peu important, ce critère s’avère évidemment moins pertinent.
Associé à l’initiative du projet
Il est courant d’attribuer un pourcentage significatif à l’associé créateur du projet afin de récompenser sa prise d’initiative. Nous observons une tendance légitime de l’associé fondateur à conserver la majorité du capital de la société, ou à disposer a minima d’un pourcentage plus élevé que ses co-associés.
Prise en compte de la valeur ajoutée apportée par les associés
Les compétences respectives des associés, idéalement complémentaires mais dont les valeurs sont parfois inégales, ont tendance à être prises en compte pour fixer la répartition initiale du capital.
Un associé disposant de compétences techniques cruciales pour le développement de la société (CTO par exemple), d’un réseau de clients potentiels ou de fournisseurs clefs, ou d’un portefeuille d’investisseurs (business angels, fonds…) fera valoir ces éléments pour négocier sa participation.
Par ailleurs, le fait qu’un associé se consacre à plein temps au développement de la société alors que d’autres associés exercent simultanément d’autre activités est un critère utile à la répartition.
Recommandation : anticiper les changements de situation ou de volonté des associés
Les trois critères fixés ci-dessus (prise d’initiative, investissement et valeur ajoutée) comportent un inconvénient : ceux-ci conduisent les associés à répartir le capital sur la base de pures projections et anticipations.
Nous invitons ainsi nos clients à faire preuve de mesure et à nuancer l’importance de ces trois critères pour les raisons suivantes :
- l’associé fondateur ayant initié la création de l’entreprise est susceptible de se désintéresser du projet suite au lancement de l’activité.
- un associé ayant financé une portion importante du lancement de l’activité ne sera pas forcément amené à contribuer au financement des phases ultérieures de développement.
- un associé s’engageant à consacrer son temps, son savoir ou son réseau à la société ne sera légalement pas tenu de le faire ou d’atteindre le résultat annoncé.
Par conséquent, des mécanismes alternatifs à une répartition figée et basée exclusivement sur les anticipations des associés peuvent être mis en place.
Mécanismes permettant de rationaliser la répartition du capital
Intéresser les associés en fonction de la valeur effectivement créée
Lorsqu’un associé fait valoir que ses compétences, son réseau ou son implication seront décisifs pour la société, il peut être pertinent de moduler son % de participation en fonction de son apport effectif sur les premières années.
Par ailleurs, en complément de l’attribution d’actions ou de parts sociales, un système de commissions versées à l’associé peut être mis en place.
Par exemple :
- l’associé en charge du développement commercial peut se voir offrir des commissions applicables au montant effectivement facturé aux client apportés.
- l’associé disposant d’un réseau d’investisseurs peut être récompensé par l’attribution d’une commission sur les montants levés par la société.
- des actions peuvent être attribuées gratuitement à un CTO lorsque la solution est fonctionnelle et commercialisée.
Juridiquement, si l’associé est rémunéré en actions, un plan d’attribution d’actions gratuites ou de bons de souscription d’actions (BSA ou BSCPE) soumis à des conditions de performance pourra être mis en place. Au contraire, lorsque le mécanisme incitatif est fondé sur une système de commissions versées en euros, un contrat d’apporteur d’affaires, un contrat de prestations de services ou un mandat de recherche de financements (selon les cas) devra être rédigé. Ces différents contrats se superposeront au pacte d’associés à conclure entre les parties prenantes.
Anticiper le désengagement d’un associé ou une mésentente au sein du pacte d’associés
L’introduction de clauses spécifiques au sein d’un pacte d’associés permet de régler le cas du départ d’un associé ou de conflits entre associés.
Nous vous invitons à consulter notre article dédié à la question des clauses de rachat et à la sortie d’un associé. Ces clauses permettent de sécuriser la situation des associés en évitant toute paralysie liée au désengagement ou à la faute d’un associé.
Dans la mesure du possible, conserver la majorité du capital de la société
Conserver plus de 50% du capital d’une société permet d’exercer un contrôle sur la gestion de l’entreprise (voir section 1 du présent article). Ainsi, quand bien même un fondateur pourra regretter d’avoir attribué un % trop important un co-associé, la détention d’une participation majoritaire lui permettra de « garder la main » sur la société (ainsi que sur ses filiales en cas de création d’un groupe de sociétés).
Enfin, la décision d’association doit être prise à la lumière de ses incidences politiques et financières décrites dans la première partie de cet article. L’euphorie liée au lancement d’une activité peut conduire un fondateur généreux à récompenser son réseau professionnel ou son cercle familial en associant certaines personnes à un projet ambitieux. Or, il convient de ne s’associer que lorsque cela est nécessaire puisque les incidences liées au partage du capital perdureront tout au long de la vie de la société. Une réflexion approfondie doit ainsi précéder tout projet d’association.
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