Les levées de fonds réalisées par l’émission de tokens utilitaires sous forme d’initial coin offering (ICO) et /ou de placements réservés à certains investisseurs sont en évolution perpétuelle.
Une catégorie particulière d’offre se popularise notamment aux Etats-Unis et consiste à lever des fonds de façon anticipée par l’intermédiaire d’un simplified agreement for future tokens (SAFT).
Le SAFT a été utilisée en 2020 par notre cabinet d’avocats lors d’une offre de tokens significative. Celui-ci permet de financer la conception du projet et des tokens en amont, et offre aux investisseurs un discount ainsi que plusieurs mesures garantissant la bonne utilisation des fonds.
Nos avocats vous proposent un descriptif du SAFT et de ses avantages.
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Sommaire
Caractéristiques du simplified agreement for future tokens utilisé en pre-sale
Les fonds investis sont versés dès la signature du SAFT avant la finalisation de l’offre
Le SAFT permet de solliciter un groupe restreint d’investisseurs lors de pré-ventes de tokens en obtenant des versements très en amont de la finalisation de l’offre.
Concrètement, une fois le SAFT signé entre la société émettrice et l’investisseur, et les procédures KYC effectuées, le prix de souscription (diminué d’un discount significatif) est immédiatement versé par l’investisseur. En rémunération du prix versé, l’investisseur se voit attribuer un droit d’attribution de tokens selon un calendrier pré-fixé dans le SAFT.
En droit français, cette opération s’analyse en une vente à terme. Ce type d’opération est parfaitement valide à la condition que l’objet de la vente, à savoir le token utilitaire, soit décrit au sein du SAFT. Il est en effet juridiquement impératif de déterminer l’objet du SAFT afin d’éviter tout risque de nullité de l’opération (et donc de remboursement des fonds perçus).
Une garantie de remboursement est offerte en l’absence de finalisation de l’offre avant une certaine date
Il est standard de garantir aux investisseurs le remboursement des sommes versées à la signature du SAFT en l’absence de création des Tokens avant une certaine deadline.
Ce mécanisme offre ainsi l’option aux investisseurs de sortir du projet dès lors que le calendrier initial n’est pas respecté. En fonction de l’état du marché et de l’évolution du projet, un report de cette deadline peut être négocié avec les investisseurs lorsque ceux-ci estiment qu’un décalage sera bénéfique au projet. L’accord de l’ensemble des parties prenantes sera toutefois nécessaire.
Nous recommandons de prévoir la faculté de prolonger ce délai à la seule initiative des fondateurs afin d’anticiper un retard éventuel.
Une clause liée aux montants minimum (soft cap) et maximum (hard cap) de l’offre peut être introduite
En fonction du type d’investisseurs et de l’attractivité du projet, les fondateurs peuvent être contraints par les investisseurs d’atteindre un certain seuil levé sous peine de devoir rembourser les souscripteurs (« soft cap », équivalent du « seuil de caducité » en droit boursier).
Concrètement, cette condition contractuelle liée au montant levé se superposera, dans le SAFT, à la condition de délai (respect de la deadline). Les fondateurs devront ainsi lever un certain montant avant une certaine date afin d’éviter de faire face aux demandes de remboursement.
Les investisseurs exigent systématiquement, à titre au moins informel, une indication du montant maximal de l’offre (hard cap). Tout comme la soft cap, cette hard cap pourra être contractualisée ce qui aura pour effet de contraindre les fondateurs à la respecter (sous peine d’engager leur responsabilité).
Des mécanismes anti-dilutifs peuvent être négociés par les investisseurs
Le cours du futur token acquis par l’investisseur au sein du SAFT étant intrinsèquement lié aux nombre de tokens émis lors de rounds ultérieurs ainsi qu’au prix fixé lors de ces rounds, certains investisseurs exigent l’introduction au sein du SAFT de mécanismes similaires à ceux utilisés lors de levées de fonds en capital.
En pratique, les investisseurs peuvent exiger de pouvoir participer par priorité à l’ensemble des rounds ultérieurs proportionnellement au pourcentage de tokens souscrits lors du 1er round, ce qui leur permettra de maintenir leur % de détention initial.
Ce droit prioritaire de souscription n’est parfois exigé par les investisseurs qu’en cas de second round réalisé à un prix inférieur à celui du premier round. Ces mécanismes liés à la dilution sont évidemment purement facultatifs.
Mécanisme de vesting des tokens attribués
Il est standard de prévoir une attribution progressive des Tokens pendant une période de vesting variant généralement entre 12 et 18 mois à compter de la première date d’attribution. Une période de lock-up peut aussi être instituée.
L’intérêt de ces mécanismes consiste principalement à soutenir la valeur du cours lors du lancement.
Autres aspects liés à la Tokens sale
Affectation des fonds levés et Exchange tokens
En fonctions des stipulations du SAFT ou du Token sale agreement, les fondateurs peuvent être tenus d’affecter exclusivement les fonds levés au développement du projet et à la création des tokens.
Il faut garder à l’esprit qu’à la survenance de la deadline, les fondateurs peuvent être tenus de rembourser les investisseurs en l’absence de remise des tokens. Cela nécessite donc de s’assurer :
- de fixer un calendrier raisonnablement atteignable.
- de veiller à ce que les caractéristiques des tokens soient conformes à ce qui est annoncé au sein du SAFT.
A cet égard, il est envisageable d’attribuer des tokens provisoires aux investisseurs. Ces tokens, nommés « Exchanges tokens » dans une opération réalisée en 2019 par notre cabinet, auront vocation à être échangés contre des tokens finaux (opération de swap) une fois ces derniers conçus et créés.
L’exchange token permet d’offrir aux investisseurs une liquidité de leur investissement avant la finalisation du token « ultime ».
Protéger la responsabilité des fondateurs
La levée de fonds en tokens est porteuse de risques. A titre non limitatif, il convient de prendre en considération les éléments suivants :
- s’assurer du caractère purement utilitaire des tokens afin d’éviter leur requalification en instruments financiers, ce qui induirait notamment l’application des règles de droit des sociétés et de droit financier (contraintes liées à la règlementation des offres aux public de titres financiers, regroupement des porteurs – en réalité actionnaires – en assemblées générales, etc..) ;
- en cas d’offre ouverte à plus de 150 personnes et n’ayant pas fait l’objet d’un white paper ayant obtenu le visa de l’Autorité des marchés financiers (AMF), respecter les interdictions légales liées aux pratiques de commercialisation de l’offre ;
- stipuler l’ensemble des clauses obligeant les fondateurs à faire leurs meilleurs effort pour permettre l’aboutissement du projet, et exclure toute obligation de résultat ;
- introduire des selling restrictions complètes interdisant notamment aux « US Residents » de participer à l’offre (ainsi qu’aux résidents Chinois, Canadiens, Australiens, Japonais…) sauf à s’attacher les services d’un cabinet d’avocats US à même de procéder aux filings nécessaires auprès de la Security Exchange Commission (SEC). Notre cabinet dispose de partenaires qualifiés en droit US ;
- prévoir la mise en place de procédures KYC adaptées ;
- etc…
Il faut garder à l’esprit qu’en cas d’évolution du projet défavorable à l’investisseur (abandon, baisse de valeur, absence de liquidité etc…), ce dernier sera susceptible de faire auditer la documentation signée et d’agir un justice afin de récupérer son investissement. Il est donc crucial de cadrer ces risques juridiques et financiers au sein de la documentation d’offre.
Financer les travaux de finalisation des tokens et du projet par l’attribution…de futurs tokens aux prestataires ou salariés
Afin de mobiliser et de fidéliser l’équipe de salariés et de prestataires en charge du développement du projet, il est courant de promettre à ces derniers l’attribution de futurs tokens.
Cette attribution consiste généralement en un complément de rémunération, mais certains prestataires sont parfois enclins à une rémunération exclusivement composée de tokens.
Il convient de définir précisément les conditions de présence, voir de performance, associées à l’attribution afin de ne récompenser que les membres ayant effectivement contribués au succès de l’opération. Tout ces éléments sont cadrés au sein d’un contrat de prestations, ou d’un contrat séparé du contrat de travail.
Il est en outre courant d’obliger les membres de l’équipe à conserver les tokens pendant une certaine durée (période de lock-up fixée généralement à 12 mois) et de prévoir un mécanisme de vesting sur plusieurs années (adapté à la durée de la condition de présence).
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