L’associé d’une société commerciale (SA, SAS, SARL…) est libre de développer une activité concurrente de celle exercée par sa société sous réserve de ne pas en être le dirigeant (Président, Gérant, Directeur général…).
Il devra toutefois veiller à développer cette activité de façon loyale, ce qui oblige à étudier précieusement les règles applicables au débauchage de nouveaux et d’anciens clients : le Tribunal de commerce est ainsi susceptible de sanctionner le transfert de marchés existants, ou non obtenus et pour lesquels des négociations sont initiées par la société. Par ailleurs, le projet concurrent ne devra pas être de nature à désorganiser la société, ou reposer sur une imitation des produits de la société qui générerait une confusion dans l’esprit du public.
Les avocats du cabinet Billand & Messié vous proposent une présentation des contraintes légales liées à la création d’une société ou d’une entreprise concurrente par un associé ou un dirigeant.
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Sommaire
L’associé non dirigeant est libre de développer une activité concurrente à celle de sa première société
La liberté de l’associé non-dirigeant
Un arrêt de la Cour de cassation relatif à un conflit entre les associés d’une SARL (Com., 15 novembre 2011, n° 10-15.049, Sté DL Finances c/ Albiac) tranche la question : « sauf stipulation contraire, l’associé d’une société à responsabilité limitée n’est, en cette qualité, tenu ni de s’abstenir d’exercer une activité concurrente de celle de la société ni d’informer celle-ci d’une telle activité et doit seulement s’abstenir d’actes de concurrence déloyaux ».
Antérieurement à cet arrêt de principe, la question n’était pas clairement tranchée et l’obligation de non-concurrence à la charge de l’associé était parfois écartée dans des cas où les juges constataient que l’associé n’avait pas un rôle prépondérant dans le fonctionnement de la société (Rouen, 19 nov. 2009, n° 08/1868, Duarte c/ SARL ERJ Sport ; Com., 5 oct. 2004, n° 02-17.375).
La restriction imposée à l’associé-dirigeant de la société
Dans l’arrêt de principe du 15 novembre 2011, la Cour de cassation relève un « manquement de M. X… à l’obligation de loyauté et de fidélité pesant sur lui en raison de sa qualité de gérant de la SARL Clos du Baty, lui interdisant de négocier, en qualité de gérant d’une autre société (la société exerçant l’activité concurrente), un marché dans le même domaine d’activité ».
Autrement-dit, le devoir fiduciaire du dirigeant envers l’associé rend le dirigeant débiteur d’une obligation de non-concurrence de plein droit qui, sauf convention contraire, lui interdit de développer une activité concurrente de celle de la société (Jurisprudence fixée, dans le même sens : Com., 24 févr. 1998, n° 96-12.638 et Com., 12 févr. 2002, n° 00-11.602).
Cela étant dit, l’associé-dirigeant a la possibilité de démissionner de ses fonctions préalablement à l’initiation du projet concurrent afin de jouir pleinement de la liberté offerte à l’associé non-dirigeant (conforté par une interprétation a contrario de Com., 12 févr. 2002, n° 00-11.602 qui condamne un dirigeant ayant créé une société concurrente avant l’expiration du préavis imposé par une clause statutaire au gérant démissionnaire).
Conseil de nos avocats : la démission ne devra pas être une démission de façade comme l’illustre l’arrêt Cass.com, 5 octobre 2004, n° 02-17375 qui évoque certes la déloyauté de l’actionnaire ancien-dirigeant mais aussi l’importance des fonctions qu’il occupe en tant que salarié de la société lésée : « M. Jean-Paul X… était le co-fondateur de la société Graphibus, qu’il a tenu dans cette société un poste de responsable, et qu’il en est toujours actionnaire, et constate qu’il est le principal responsable salarié de cette société et se présente aux clients potentiels comme le responsable de la société NDP (société concurrente) laquelle a un objet social identique à celui de la société Graphibus et a installé ses locaux professionnels en face de ceux de cette dernière ; qu’en l’état de ces constatations faisant ressortir le manquement de M. Jean-Paul X… à son obligation de loyauté envers la société dont il demeurait actionnaire, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision (…) .
Voir notre article dédié aux obligations de non concurrence du dirigeant non associé.
La société ou l’entreprise concurrente ne doit pas exercer une concurrence déloyale
Qu’est ce que la concurrence déloyale?
Sanctionné sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, l’acte de concurrence déloyale consiste traditionnellement en un agissement, intentionnel ou involontaire, contraire aux lois et aux usages honnêtes en matière industrielle et commerciale. La jurisprudence actuelle fait toutefois résider l’acte de concurrence déloyale dans l’idée plus générale de rupture de l’égalité dans les moyens de la concurrence. L’action en concurrence déloyale concours ainsi à la protection du droit de propriété du commerçant sur son fonds de commerce. Nos avocats exercent l’action en concurrence déloyale devant le Tribunal de commerce du lieu du siège social de la société concurrente.
Typologie des comportements à risque pour l’associé
Imitation génératrice d’un risque de confusion
« En l’absence de tout droit privatif, le seul fait de commercialiser des produits identiques à ceux distribués par un concurrent n’est pas fautif » (Cass. com., 9 juin 2004), sauf si les circonstances particulières qui ont accompagné cette commercialisation sont de nature à caractériser une faute. Tel est le cas dès que lors l’imitation génère un risque de confusion, ce qui nécessite une certaine originalité du produit objet de l’imitation.
Exemples de sanctions :
- imitation d’un signe distinctif (slogan, nom de domaine, insigne) ;
- imitation d’un produit et des modalités de présentation du produit : sanction d’un risque de confusion résultant de la présentation des gammes de chemisiers selon des modalités identiques, de l’utilisation des mêmes bustes, de l’imitation de l’aménagement des magasins de la société demanderesse, et du fait que la société défenderesse a exposé dans ses boutiques les panneaux publicitaires de la société demanderesse en prenant le soin de dissimuler à l’aide d’un crayon feutre la dénomination de cette société (Cass.com. 28 novembre 2006, n° 04-20.255, Publié au Bulletin).
Procédés de désorganisation
De tels procédés auront pour objet ou pour effet (l’intention de nuire est indifférente) de désorganiser une entreprise :
- la désorganisation par l’intermédiaire du personnel de l’entreprise : le débauchage de salariés liés par une clause de non-concurrence ou le débauchage fautif de salariés, la caractère fautif étant caractérisé par application d’un faisceau d’indice (délai de débauchage, incitation au départ, nombre de salariés et surtout connaissance du savoir-faire de l’entreprise par le salarié débauché). A contrario, n’est pas fautif le débauchage, même massif, par l’intermédiaire de petites annonces ou à l’initiative des salariés.
- la désorganisation de l’activité commerciale de l’entreprise :
- détournement de commandes ;
- détournement de fichiers-clients, aussi sanctionné via l’abus de confiance (L. 314-1 du Code pénal : « le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé ») ;
- usurpation de secret d’affaires ou de de fabrication : elle consiste à exploiter ou à divulguer de façon illicite un secret dont on a pris connaissance légitimement, ce qui suppose que l’associé concurrent se soit engagé à ne pas exploiter personnellement un secret.
Comportements parasites
La parasitisme consiste à « vivre en parasite dans le sillage d’un autre en profitant des efforts qu’il a réalisés et de la réputation de son nom et de ses produits (V. Y. SAINT-GAL, Concurrence parasitaire en agissements parasitaires, RIPIA 1956. 37). L’acte doit causer une rupture d’égalité dans les moyens de la concurrence par appropriation du travail d’autrui. Le parasitisme est souvent retenu par les juges en conjonction avec d’autres fautes sanctionnées au titre de la concurrence déloyale (risque de confusion principalement).
Exemples : reproduction des caractéristiques essentielles d’un article de prestige, utilisation d’un homonyme pour tirer profit de la notoriété qui y est attachée, reprise de slogans publicitaires, imitation des installations de l’entreprise…
Avocats Experts en concurrence et contentieux commercial
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