La loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite « Loi Pacte », a pour objectif de favoriser le développement et la croissance des entreprises françaises.
A ce titre, de nombreux domaines du droit seront impactés : concrètement, que va changer cette loi en droit des affaires ? Notre cabinet d’avocats vous propose une présentation des principales mesures de la Loi Pacte en droit des sociétés.
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Sommaire
Le renforcement de la notion d’intérêt social et la création d’un statut de « société à mission »
La Loi Pacte vient renforcer l’importance de la notion d’intérêt social et ajouter la prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux dans le cadre de la gestion d’une société : un nouvel alinéa disposant ainsi que « la société est gérée dans son intérêt social en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité » est ajouté à l’article 1833 du code civil.
La loi Pacte vient en outre modifier les dispositions de l’article 1835 du Code civil, offrant la possibilité aux entreprises qui le désirent de se reconnaître une « mission » (« raison d’être »), distincte de l’objet social, qui pourra être inscrite dans les statuts. Cette faculté est soumise à certaines conditions :
- les statuts doivent préciser cette « mission » au sens de l’article 1835 du Code civil ainsi que le ou les objectifs sociaux et environnementaux poursuivis ;
- les statuts doivent préciser les conditions et modalités de suivi de cette mission (avec la mise en place d’un comité spécialisé en charge de ce suivi, lequel doit être distinct des organes sociaux de la société).
Cette faculté est offerte à toutes sociétés, quelque soit leur taille. Les sociétés employant moins de 50 salariés peuvent désigner un référent de mission se substituant au comité de mission spécialisé.
L’assouplissement du régime des avances en compte courant
Les comptes courants d’associés ou d’actionnaires correspondent à des avances de fonds, couramment appelées apports en compte courant, réalisées par les associés/actionnaires d’une société. Ils constituent une source de financement alternative au circuit bancaire.
La faculté de consentir des avances en compte courant étaient jusqu’à présent limitée :
- aux associés ou actionnaires (en fonction du type de société) détenant au moins 5% du capital social ;
- aux associés en nom ou aux commanditaires d’une société de personnes ;
- aux membres du conseil d’administration, du directoire et du conseil de surveillance ou aux gérants ;
- aux salariés de la société, dans la limite de 10% des capitaux propres.
Afin de favoriser ce type de financement, le législateur a assouplit les conditions d’octroi des avances en compte courant.
Désormais, tout associé, quel que soit la fraction de capital qu’il détient, peut consentir des avances en compte courant à sa société (article L. 312-2 du Code monétaire et financier).
En outre, les directeurs généraux, les directeurs généraux délégués de sociétés anonymes et les présidents de sociétés par actions simplifiées peuvent consentir des avances en compte courant au bénéfice de la société dont ils sont mandataires sociaux (article L. 312-2 du Code monétaire et financier) .
Le renforcement du contrôle des conventions réglementées dans les sociétés anonyme (SA) et les sociétés en commandites par actions (SCA)
Les mesures prévues portent tout d’abord sur les sociétés cotées, qui seront désormais obligées de publier sur leur site les informations concernant les conventions réglementées au moment de leur conclusion.
La loi comprend également des mesures qui affectent les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions non cotées.
La Loi Pacte prévoit ainsi que le dirigeant ou l’actionnaire indirectement intéressé à une convention réglementée doit informer le conseil d’administration ou de surveillance dès qu’il a connaissance de l’existence d’une convention soumise à l’article L. 225-38 ou à l’article L. 225-86 du Code de commerce (article L. 225-40 du Code de commerce).
Jusqu’à présent, cette obligation d’information pesait seulement sur la personne « intéressée ».
La loi Pacte dispose en outre que la production du rapport sur les conventions réglementées incombera au président du conseil d’administration pour les SA ou SCA n’ayant pas désigné de commissaires aux comptes.
Par ailleurs, l’article L. 225-37-4 du Commerce est modifié : la mention « possède directement ou indirectement plus de la moitié du capital » est remplacée par « contrôlée par la première au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce ».
En conséquence, devront être mentionnées les conventions réglementées conclues non seulement avec les sociétés dont la société concernée détient directement ou indirectement plus de la moitié du capital, mais aussi avec les sociétés (Article L. 233-3, I du Code de commerce) :
- dont elle détient la majorité des droits de vote en vertu d’un accord conclu avec les actionnaires ;
- ou sur lesquelles elle exerce un contrôle de fait ;
- ou dont elle est un associé ou actionnaire disposant du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres de la direction ;
- ou dont elle détient directement ou indirectement plus de 40 % des droits de vote et qu’aucun autre associé ou actionnaire ne détient une fraction de droits de vote supérieure à la sienne.
Enfin, la ou les personnes intéressées étaient jusqu’à présent exclues du vote en assemblée générale : leurs actions n’étaient prises en compte ni pour le calcul du quorum ni pour le calcul de majorité. La Loi Pacte amende cette règle à deux égards (article L. 225-40 du Code de commerce) :
- la ou des personnes indirectement intéressées à la convention sont désormais également exclues du vote ;
- les actions de la ou des personnes directement et indirectement intéressées sont dorénavant prises en compte pour le calcul du quorum (mais ne sont pas prise en compte pour le calcul de la majorité).
Le développement de l’actionnariat salarié
Afin de stimuler l’actionnariat salarié, le législateur autorise notamment les sociétés par actions simplifiées (ou les sociétés liées) à procéder à des offres de titres à leurs salariés et/ou dirigeants (article L. 227-2 du Code de commerce).
La Loi Pacte prévoir par ailleurs que les détenteurs de titres peuvent partager avec les salariés une portion des plus-value de cession de titres (article L. 23-11-1 du code de commerce).
L’accès aux marchés financiers simplifié pour les PME
La Loi Pacte contient plusieurs mesures visant à faciliter l’accès aux marchés financiers pour les petites et moyennes entreprises.
L’article 75 de la Loi Pacte prévoit notamment en ce sens :
- un rehaussement du seuil d’établissement du prospectus à 8 millions d’euros et supprime la condition relative à la majorité du capital de l’émetteur. La production et la publication d’un document synthétique destiné à l’information du public (dont les conditions sont précisés par le règlement général de l’AMF) est cependant exigée ;
- un abaissement du seuil permettant la mise en œuvre de la procédure de retrait obligatoire, de 95% à 90%.
La modernisation du régime des actions de préférence
Les actions de préférence sont des titres de capital, « avec ou sans droit de vote, assortis de droits particuliers de toute nature, à titre temporaire ou permanent » (article L. 228-11, al. 1er du Code de commerce), pouvant être émis uniquement par des sociétés par actions (SA, SCA et SAS).
L’article 100 de la Loi Pacte vient modifier plusieurs articles du Code de commerce relatifs aux actions de préférence.
L’extension de la possibilité de créer des actions de préférence à droit de vote multiple
La Loi Pacte autorise dans toutes les sociétés par actions non cotées la création d’actions de préférence à droit de vote multiple, ou encore à droit de vote double, sans avoir à respecter les conditions posées par l’article L. 225-123 du Code de commerce (article L. 228-11, al. 1er du Code de commerce).
Auparavant, les droits de vote multiples pouvaient seulement être prévus pour les actions de préférence émises par les sociétés par actions simplifiées.
L’extension des cas de retrait du DPS (droit préférentiel de souscription)
La Loi Pacte permet par ailleurs de retirer le droit préférentiel de souscription à toutes les actions de préférence comportant des droits financiers limités, alors qu’avant cela n’était autorisé que pour les actions sans droit de vote à l’émission (article L. 228-11, al. 5 du Code de commerce)
L’extension des cas de rachat des actions de préférence
La nouvelle loi permet , en outre, le rachat des actions de préférence à l’initiative conjointe de la société et du détenteur de l’action de préférence (et non plus seulement à l’initiative exclusive de la société comme cela était précisé avant – article L. 228-12, III, 4 du Code de commerce).
La clarification de la procédure des avantages particuliers
Enfin, la Loi Pacte vient clarifier le champ de la procédure des avantages particuliers, qui impose notamment en cas d’émission la désignation d’un commissaire aux apports.
La loi précise ainsi que la procédure des avantages particuliers s’applique non seulement aux actionnaires existants, mais aussi aux personnes qui le deviennent au moment de la souscription (article L. 228-15, al. 1er du Code de commerce).
Vers plus de transparence de la rémunération des dirigeants
Dans les sociétés cotées en bourse, les écarts de rémunération entre les dirigeants et le salaire moyen et médian des salariés devront être communiqués. L’entreprise devra aussi indiquer l‘évolution de ces ratios d’équités sur une période de cinq ans.
Une représentation hommes-femmes plus équilibrée au sein des conseils d’administration ou de surveillance des sociétés anonymes
La Loi Pacte comporte plusieurs dispositions visant à favoriser l’équilibre hommes-femmes au sein des organes de gestion des sociétés anonyme.
La nullité des délibérations du conseil d’administration ou de surveillance est désormais encourue en cas de participation d’un membre nommé en violation du principe de mixité (articles L. 225-18-1 (pour les SA à conseil d’administration) et L. 225-69-1 (pour les SA à Directoire et Conseil de surveillance) du Code de commerce).
Rappelons qu’auparavant, la loi sanctionnait par la nullité toute nomination intervenue en violation de ces règles, mais cette nullité n’entraînait pas celle des délibérations auxquelles avait pris part le membre du conseil irrégulièrement nommé.
Il convient de préciser que les membres du conseil d’administration ou de surveillance élus par les salariés ne sont pas pris en compte pour les règles de représentation équilibrée entre les femmes et les hommes.
Par ailleurs, si le conseil d’administration décide de nommer un ou plusieurs directeurs généraux délégués, le directeur général est tenu de proposer des candidats en s’efforçant de rechercher une représentation équilibrée des femmes et des hommes (article L. 225-53 du Code de commerce).
Des mesures similaires sont prévues pour les SA à directoire : sa composition « s’efforce de rechercher une représentation équilibrée des femmes et des hommes ». L’article 225-58 du Code de commerce prévoit désormais que le directoire détermine un processus de sélection qui garantit jusqu’à son terme la présence d’au moins une personne de chaque sexe parmi les candidats.
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